
« Alors que nous commençons à travailler sur un nouvel album et que nous allons poursuivre notre tournée best of Dreamworld, le moment semble bien choisi pour faire le point et rassembler tous les singles que nous avons sortis », déclaraient les Pet Shop Boys il y a quelques semaines. À l’origine de Smash, une nouvelle compilation de 55 titres répartis sur 3 CD, 3 cassettes et 6 vinyles, il y avait une demande de Warner Bros de rééditer en vinyle la première compilation du duo, Discography, publiée en 1991 et qui n’était plus disponible. Neil et Chris ont alors suggéré de pousser l’idée jusqu’à inclure tous les singles du duo.
En bacs le 16 juin 2023, Smash couvrira 35 ans de tubes pop (1985-2020) et l’on y retrouvera donc presque tous les singles des PSB. Presque car, par souci de place sans doute, ne sont inclus que les singles commercialisés au Royaume-Uni, et à partir de Suburbia (1986) seulement ceux parus en CD. D’où l’absence de London, Integral, Beautiful People, Axis ou Burning the Heather. On nous précise également que « Lorsqu’il y a un single avec deux faces A ou un EP, uniquement la chanson lead qui a été jouée en radio est incluse. Toutes les versions sont les versions singles envoyées aux radios, sauf pour New York City Boy, inclus ici dans sa version American radio edit, préférée par Chris et Neil ». Le panorama vaut tout de même le détour, et le plaisir se prolonge également en version vidéo avec une version coffret 3 CD et 2 Blu-ray offrant l’intégralité des clips.
Afin de fêter dignement ce nouveau bilan discographique, on a choisi de revenir sur quatre singles (un par décennie) parmi les plus resplendissants du duo électro-pop.
It’s a Sin (1987)

Après le succès de leur premier album Please, Neil et Chris, plutôt que de partir en tournée, se plongent dans le travail d’écriture et de composition de leur deuxième disque, Actually. Le premier extrait en sera It’s a Sin, une chanson écrite en 1982 sur des accords de Chris qui évoquaient à Neil des ambiances très religieuses. Il n’en fallait pas plus pour qu’il se mette rapidement à chanter dessus « It’s a sin », et le texte de la chanson fut ainsi écrit en cinq minutes. Avec y avoir greffé un pont importé d’une autre chanson, les Boys mettent sur bande une maquette avec leur producteur Bobby Orlando en 1984. Au moment d’enregistrer leur premier album, ils demandent à Stock Aitken et Waterman de produire le morceau mais ces derniers refusent. Neil et Chris ressortiront It’s a Sin pour leur deuxième album avec la volonté d’en faire un hymne extrêmement dramatique, flamboyant, kitsch, déployant toute une imagerie catholique qui, selon son auteur, n’est pas à prendre au pied de la lettre. Peu satisfaits de la production de Julian Mendelsohn, réalisateur de l’album, les deux musiciens demandent à Stephen Hague de retravailler le morceau. Alors qu’une autre chanson était prévue pour présenter l’album Actually au public, elle sera finalement remplacée par It’s a Sin sur les conseils de la maison de disques. Avec un clip signé Derek Jarman, la chanson devient le deuxième n°1 des Pet Shop Boys en Angleterre, et leur première entrée au Top 50 en France en août 1987, avec une 12e place à la clé et plus de 150 000 ventes. It’s a Sin est remise en avant en 2021 grâce à la série du même nom et à son interprète Olly Alexander (du groupe Years & Years) qui reprend la chanson en solo mais également en duo avec Elton John (notamment durant les Brit Awards pour une prestation haute en couleur).
Go West (1993)

Suite au plus introspectif Behaviour en 1990 et à une première compilation publiée l’année suivante, les PSB sont de retour en 1993 avec un album qu’ils désirent résolument dance, Very. Le deuxième single extrait en sera Go West, une chanson qui aurait dû sortir bien avant. Invités par le réalisateur Derek Jarman à se produire lors d’une manifestation en soutien aux victimes du VIH, Neil et Chris ont le souhait d’y interpréter une reprise. S’ils pensent tout d’abord à une chanson des Beatles, Chris se ravise en proposant un succès des Village People, Go West, que Neil n’a jamais entendu. Mais à la première écoute ce dernier déteste la chanson. Chris, sûr de son coup et connaissant bien son partenaire, l’appâte en lui faisant remarquer que la progression d’accords de la chanson est la même que celle du Canon de Pachelbel. Neil se laisse séduire mais a bien du mal à se familiariser avec les paroles des Village People qu’il recopie pour les avoir sous les yeux lors de cette prestation live. Peine perdue puisqu’un ventilateur fait s’envoler son antisèche dès le début de la chanson dont il se voit contraint d’improviser le texte. La promesse d’un pays de Cocagne véhiculée par la chanson, cette « utopie gay » décrite par Chris, n’est pas un choix de reprise anodin à une époque où le Sida fait encore des ravages dans la communauté homosexuelle. Chris et Neil décident de sortir leur nouvelle version de Go West en single, et ce sera le premier titre sur lequel ils travailleront dans le studio que vient d’aménager Chris dans une remise de sa maison. Neil souhaite sortir le titre fin 1992 mais les garçons ne sont pas satisfaits du mixage réalisé par Mark Stent et confient la chanson à Brothers In Rhythm puis à Stephen Hague pour le mixage final. Avec son chœur viril, une nouvelle introduction qui n’est pas sans rappeler l’hymne de l’Union soviétique et l’ajout d’un nouveau pont, les PSB s’approprient totalement cette chanson qui reprend une expression faisant référence à la conquête de l’Ouest américain, mais qui évoque aussi le mouvement de libération homosexuelle ainsi que la récente chute de l’URSS comme le laisse entendre le clip de la chanson réalisé par Howard Greenhalgh. Il en résulte un tube disco étincelant, à l’ironie décomplexée et au sous-texte politique dont les boys sont coutumiers, qui deviendra plus tard un hymne de matchs de foot. Go West se classera n°2 au Royaume-Uni ainsi qu’en France en 1993 (Freddie Mercury avec Living on My Own ne se laissera pas détrôner) et n°1 en Allemagne. L’album Very sera le seul du duo à être certifié disque d’or en France.
I’m with Stupid (2006)

Comme bien souvent chez Pet Shop Boys, un album se construit en réaction au précédent. Après les ambiances plus acoustiques de Release en 2002, le duo décide que son successeur sera totalement électronique. Mais les choses ne se passent pas toujours comme prévu… Ayant sollicité les services de Trevor Horn pour produire le titre Numb, écarté des quelques inédits réalisés pour leur best of de 2003, Neil et Chris décident de poursuivre la collaboration sur le nouveau disque, Fundamental. Horn ne tarde pas à convoquer tout un orchestre, s’éloignant ainsi sensiblement de la forme initialement souhaitée de l’album. Sur le fond, Fundamental est un album ouvertement politique, reflet du monde post 11 septembre, et le premier single, I’m With Stupid, donne le ton. S’il s’agit en vérité d’un second choix (les garçons voulaient sortir The Sodom and Gomorrah Show, ce que la maison de disques refuse, effrayée à la simple évocation du nom Sodome), la chanson n’en est pas moins une bonne introduction à l’album, avec sa structure efficace à souhait. Le texte quant à lui, décrit à première lecture une relation amoureuse ambigüe et intéressée. Si, bien évidemment, la chanson ne dévoile pas son sous-texte, c’est Neil qui en donnera lui-même les clés. « Ça parle de George Bush et Tony Blair. Le titre vient de ces t-shirts qu’on voit dans les clubs de vacances. C’est une sorte de satire : Blair pense que c’est Bush l’idiot des deux. Le narrateur est Tony Blair. C’est écrit comme s’il s’agissait d’une chanson d’amour, à propos de quelqu’un qui sort avec un macho, se moquant de la relation entre les deux au lendemain de la guerre d’Irak. » Mais l’idiot des deux est-il vraiment celui auquel on pense ?… Avec son clip parodique dans lequel Neil et Chris sont mimés par les deux comédiens de la série humoristique Little Britain, et dans lequel on retrouve des références aux clips de Go West et Can You Forgive Her?, I’m With Stupid entre directement à la 8e place des charts au Royaume-Uni.
Love Is a Bourgeois Construct (2013)

Lorsque sort Electric, le douzième album, en 2013, la période des tubes disco-pop qui trustent les charts est révolue, mais les Pet Shop Boys accèdent au statut de « référence », d’« intouchables », de papes de la pop anglaise qui se reflète dans les critiques dithyrambiques qu’on leur accorde. C’est également le moment où le duo se sépare de son label historique Parlophone pour créer sa propre structure, x2, libéré de toute contrainte. Somme de musiques électroniques, à nouveau en contraste avec le précédent disque, Electric propose neuf chansons qui s’affranchissent plus ou moins des formats pop, dans leur structure mais également dans leur durée (la plupart des morceaux frôlent ou dépassent les six minutes). Le disque sera réalisé par Stuart Price (à qui l’on doit notamment le Confessions on a Dance Floor de Madonna). Arrêtons-nous sur le troisième extrait de l’album, Love Is a Bourgeois Construct, qui renoue avec la grandiloquence et les motifs musicaux de prédilection des grands tubes populaires des PSB. Inspiré d’un passage du roman Jeu de société de David Lodge, le texte porte un regard désenchanté sur l’amour, concept fictionnel inventé par la bourgeoisie selon le narrateur. La composition, quant à elle, repose sur un sample du semi-opéra King Arthur composé en 1691 par Henry Purcell et repris par le compositeur Michael Nyman pour la bande originale du film Meurtre dans un jardin anglais en 1982. Un sample classique, un chœur masculin, un hymne disco épique, la formule ne vous rappelle rien ? Taillé pour les clubs, Love Is a Bourgeois Construct, se classera n°1 du Billboard Dance Singles Sales mais ne bénéficiera malheureusement d’aucun clip.
Un super coffret en perspective. IT’S A SIN est un très bon titre mais pour moi WEST END GIRLS et LOVE COMES QUICKLY sont deux de mes mes titres préférés pour la période 80’s.
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Un des meilleurs groupe au monde…il y a toujours quelque chose de mélancolique dans toutes leurs chansons ! Vivement le prochain album et je suis heureux que cette compilation à un ordre chronologique..manque quand même « How can you expect to be… »mais c’est un détail….
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