Kim Wilde – Kids in America

Chez Kim Wilde, la musique est une affaire de famille. Fille de deux musiciens, la jeune Anglaise va faire ses débuts en chanson un peu par hasard mais surtout par l’intermédiaire de son frère cadet, Ricky. Ce dernier enregistre des disques depuis qu’il a 11 ans sous la houlette de son père, Marty Wilde, lui-même chanteur renommé qui a notamment classé quatre singles dans le top 5 anglais entre 1958 et 1959. En 1980, Marty Wilde est en studio où il enregistre un nouvel album quand on le réclame à l’improviste pour une émission télévisée. Comme les heures de studio ont été payées, il propose à son fils d’en bénéficier jusqu’à son retour. Ricky en profite pour enregistrer quelques maquettes avec lesquelles il décroche un contrat avec Mickie Most chez RAK Records. Ricky s’en souvient pour Fréquenstar en 1992 : « Quand je suis arrivé au studio, j’ai demandé à la personne qui devait me produire, Steve, si je pouvais faire venir ma sœur pour les voix d’accompagnement. Kim est arrivée et a commencé à chanter. A ce moment-là, Mickie Most est entré. Il l’a écoutée et il a dit qu’elle était bonne, qu’il aimait sa voix et qu’avec Steve, ils pourraient peut-être la produire. » Sauf que Ricky ne l’entend pas de cette oreille, et voyant les choses lui échapper, il rentre chez lui et compose le soir même la musique de ce qui va devenir Kids in America. Pour le texte, il fait appel à son père Marty qui va dépeindre une Amérique fantasmée par la jeunesse de l’époque, mais du point de vue d’une autre génération. « J’avais vu une émission sur les adolescents américains qui m’avait fichu une peur bleue. C’était comme un film X. Ils ne semblaient avoir aucune émotion. J’ai pensé : « Mon dieu mais qu’est-ce que ça va donner quand ils seront adultes ? » C’est sans doute ce que s’étaient déjà demandée l’ancienne génération à mon propos et celui des autres jeunes rockers. Les paroles racontent la vie de ces gamins », expliquera Marty au Guardian en 2017.

Pour Kim Wilde, Kids in America aura une autre signification : « Comme tous les gamins qui ont grandi avec La Fièvre du samedi soir, on imaginait la jeunesse américaine bien plus amusante que la nôtre : les drive-ins, les hamburgers, les supers fringues… La chanson a marché parce qu’on avait tous le même fantasme ».

Ricky réserve donc le studio du groupe The Enid dans le Hertfordshire sans en toucher mot à son producteur, et enregistre Kids in America qu’il va produire lui-même avec l’aide de Steve Stewart de The Enid. Lorsqu’il fait écouter le titre à Mickie Most, ce dernier n’a aucun doute possible : il s’agit d’un tube ! Mais il tient cependant à le remixer lui-même dans son propre studio. Introduit par un synthé qui martèle la rythmique et reproduit des sons urbains oppressants, Kids in America est une fusion de rock et de new wave qui s’inscrit dans l’air du temps. Composé par Ricky sur son synthé Wasp, c’est lui qui jouera de tous les instruments sur le morceau à l’exception de la batterie, confiée à Chris North de The Enid. Quant aux choristes masculins, il s’agit du chanteur Alan Cowley (à l’époque petit ami de Kim) épaulé bien entendu par Ricky. L’interprétation de Kim est d’une fraîcheur incroyable, et son timbre si particulier est un atout majeur comme l’avait deviné Mickie Most. Une spontanéité qu’on doit sans doute à la vitesse prodigieuse de composition et d’enregistrement de la chanson. Comme elle l’explique à Melody Maker en avril 1981 : « Ricky et mon frère l’ont écrite rapidement, elle a été maquettée rapidement, mixée rapidement et a grimpé dans les charts rapidement. C’est ce que j’aime dans la musique pop : écrire une bonne chanson, l’interpréter, et passer immédiatement à la prochaine avant d’avoir le temps de trop y penser ».

Pourtant, entre le moment où la chanson est enregistrée et celui où le 45 tours est en bacs, il va se passer plusieurs mois d’attente pendant lesquels la jeune chanteuse, qui a quitté son école d’art, se trouve un petit boulot dans un bar. Entre-temps, quelques séances photos sont organisées et une vidéo réalisée par Brian Grant est tournée dans laquelle Kim, qui n’a pourtant pas d’expérience devant la caméra, se montre très à l’aise.

Finalement, le 26 janvier 1981, le 45 tours est enfin distribué au Royaume-Uni, avec en face B Tuning in Tuning On, qu’on retrouvera plus tard sur le premier album. Un mois plus tard, elle apparaît à Top of the Pops et le single, 43e cette semaine-là, grimpe à la 18e place la suivante, avant d’entrer dans le top 10 et de culminer deux semaines à la 2e place. Le succès contamine rapidement toute l’Europe (et même les États-Unis avec une 25e place au Billboard) et, après une première apparition française dans le Collaro Show le 15 avril, Kids in America se classe dans les 20 meilleures ventes fin juin et devient un tube d’été chez nous, qui ne déloge toutefois pas de la première place le tube d’une autre Kim, Bette Davis Eyes. Dépassant les 600 000 ventes, le 45 tours est disque d’or.

Aujourd’hui emblématique de ce début de décennie 1980, Kids in America sera remixé, repris (y compris par Kim Wilde elle-même sur son album Never Say Never en 2006) et utilisé maintes fois au cinéma ou à la télévision.

4 commentaires

  1. J’ai découvert Kim Wilde avec ce titre le 15 avril 1981 chez Collaro dans son émission déjantée du samedi soir « Collaro Show ». Elle chantait dans une pseudo cabine d’avion, petite mise en scène sympa.
    Tout de suite j’ai flairé le gros hit que ça allait être et ai couru l’acheter le mardi suivant chez ma disquaire de Bazas (lundi fermé !).
    Toute le monde ne sera pas aussi réactif que moi car le titre va mettre un certain temps à décoller.
    Quelques jours plus tard je découvrais la face B du 45 trs « Tuning in, tuning on », excellente selon moi.
    D’ailleurs l’été 81 sera celui des deux Kim puisque Kim Carnes cartonnera avec Bettes Davis eyes.
    Il y aura même un 3ème Kim à la rentrée, venu du Danemark celui-là : Kim Larsen « Donnez-moi du feu » (si tu veux !!).
    Chez Collaro dans cette même émission il y avait aussi les Sparks qui chantaient sur un ring de boxe « Funny face », le follow-up du gros hit « When I’m with you ».

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