Caroline Legrand – J’aurais voulu te dire

Il était évident que Caroline Legrand devienne artiste. À cinq ans, la petite fille apprend la danse classique, puis ce sera la danse brésilienne, le chant et les percussions, le jazz… À dix ans, elle travaille déjà avec la chanteuse brésilienne Nazaré Pereira, une amie de sa mère, elle suit ses cours de danse puis se produit dans ses spectacles où elle assure aussi des chœurs. On l’entend notamment sur le tube La Marelle, qui se vend à plus de 200 000 exemplaires en 1980, et on la voit dans le clip. Très jeune elle a donc déjà l’expérience de la scène et, plus tard, elle continuera à travailler dans des spectacles, pour les enfants, les seniors ou dans les restaurants.

À douze ans, le compositeur de musique de films Michel Magne la prend sous son aile et la fait travailler chez lui. Il l’inscrit même pour le concours Eurovision mais lorsqu’il met fin à ses jours fin 1984 le projet tombe à l’eau. Entretemps, Caroline a enregistré un premier 45 tours. Elle a treize ans et chante Cool Raoul, relax Max, un disque réalisé et arrangé par Slim Pezin qui lui permet de faire sa première télé en vedette dans Jour J sur TF1. À la même époque, elle enregistre dans le même studio que Céline Dion et reçoit la visite surprise de la jeune chanteuse accompagnée de son manager René Angélil qui viennent la féliciter. Ils lui proposent même de rejoindre leur équipe mais, déjà en contrat, Caroline se sent obligée de décliner la proposition.

À seize ans, alors qu’elle est au lycée, elle se lance dans l’aventure des radios libres avec Daniela Lumbroso, l’occasion pour elle d’apprendre les rouages de l’animation, du montage et de dénicher des interviews d’artistes connus. Un peu plus tard, c’est avec Étienne Roda-Gil qu’elle travaille à des chansons, mais le parolier est lent, préoccupé par la santé de sa femme et accaparé par le premier album de Vanessa Paradis dont il signe tous les textes.

Caroline, qui aime bien sortir, se retrouve une nuit à l’Orange bleue, une boîte du quartier de l’étoile à Paris qui organise un concours de chant. Dans la salle, se trouve un certain François Feldman. « Je sors beaucoup. Un soir, en boîte, on m’a présenté Caroline, à un concours de chant. Elle était avec sa mère et sa voix m’a conquis. Sa petite taille et sa trempe m’ont fait penser à Edith Piaf et Florent Pagny. Je l’ai rappelée six mois après pour lui proposer J’aurais voulu te dire. D’ailleurs, cette chanson a été reprise plus tard par une chanteuse canadienne qui l’a classée n°1 dans son pays », expliquera le chanteur au magazine Platine. Il lui propose effectivement ce slow qu’il a composé et dont Jean-Marie Moreau a écrit le texte. Caroline, qui voit enfin un projet concret se profiler, d’autant plus avec un chanteur à succès, accepte évidemment la proposition, quitte à fâcher Roda-Gil qui lui en voudra un peu.

Elle signe chez Philips et enregistre J’aurais voulu te dire en 1988, elle a vingt ans. La chanson est réalisée par Feldman qui signe également les arrangements avec Thierry Durbet. Le 45 tours sort avec une version instrumentale en face B tandis qu’une version longue est réalisée pour le maxi. La promo télé démarre en novembre et va s’intensifier début 1989. Le charme et la voix de l’interprète, la mélodie efficace de Feldman et le texte de Jean-Marie Moreau qui égrène les regrets en invoquant les fantômes de la littérature américaine et les mystères de l’Asie, font de J’aurais voulu te dire un succès imparable qui grimpe jusqu’à la 6e place du Top 50 fin avril 1989. Le disque s’écoule à plus de 200 000 exemplaires et Caroline Legrand reçoit le prix de la meilleure chanteuse au festival du premier 45 tours de Bordeaux.

Les débuts sont prometteurs, mais la suite se fera sans l’aide de François Feldman. « Ça s’est arrêté car elle voulait travailler avec son beau-père, un musicien », dira-t-il. Les singles suivants (Il fait planer ta vie, Comme un train qui roule…) n’auront pas le même retentissement et le premier album n’arrivera qu’en 1992. Le deuxième, sous le nom de Karoline Legrand en 1996, est concocté par Didier Barbelivien mais ne reçoit qu’une promotion limitée.

En 2004, elle est de retour sous le nom de Zaya avec le titre Initiation of Love produit par Gérald du groupe G-Squad qui veut en faire une icône gay. « Le fait de faire des albums, de passer à la télé, c’est un moyen de m’amener à la scène », confiera-t-elle. Ce qu’elle ne manque pas de faire par la suite en se produisant avec le Karoline Legrand Blues Project avec qui elle tourne toujours. Artiste touche à tout, elle est aussi comédienne (on la voit dans la série Salut les copains en 1991 puis dans un documentaire de Niels Tavernier).

Quant à J’aurais voulu te dire, la chanson sera en effet reprise au Québec par Johanne Blouin qui en fait un succès, et par François Feldman lui-même en duo avec Mamido en 1997 (41e au Top 50).

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