Gérard Berliner – Louise

Gérard Berliner - Louise Pop Music Deluxe

Déterminé très jeune à devenir comédien ou chanteur, Gérard Berliner arpente les plateaux de la SFP (Société Française de Production) pour faire de la figuration dans les émissions de variétés, notamment chez les Carpentier. Il peut ainsi approcher les artistes et se permet même de leur demander des conseils. Il y a toujours un piano qui traîne dans les studios et, dès qu’il le peut, il se met à jouer des airs de son invention dans l’espoir de se faire remarquer. A force de ténacité, il croise le chanteur et compositeur Michel Handson qui lui présente le producteur Jacky Rault. Trois 45 tours sont enregistrés entre 1974 et 1978 avec à la clé une tournée d’été en compagnie de Martin Circus et Georgette Plana. Mais le succès se fait toujours attendre et, quelques essais plus tard (sous les pseudos Gino Lorenzi ou Toto de Miramar), il enregistre des maquettes avec Roland Romanelli qu’il a rencontré alors qu’il chantait en première partie de Marie-Paule Belle.

C’est en 1981 qu’une rencontre déterminante va faire basculer le destin du jeune chanteur. Sur les conseils de son oncle, et un peu à reculons puisqu’il veut écrire lui-même ses textes, il prend contact avec l’auteur Frank Thomas (à qui l’on doit notamment de nombreux succès pour Polnareff, Sylvie Vartan, France Gall, Claude François, Stone et Charden…). Un dîner est organisé et les deux garçons se retrouvent dès le lendemain matin afin que Frank Thomas présente des textes au jeune artiste. Parmi ceux qu’il lui fait lire il y a Louise. Subitement inspiré, Berliner va en composer la mélodie en seulement deux heures le matin suivant et, sans perdre une minute, il prend rendez-vous avec Romanelli qui est justement en studio avec Jeanne Moreau. Très tôt le matin, avant que l’actrice-chanteuse n’arrive pour poser sa voix sur le double album Jeanne Moreau chante Norge, Berliner vient enregistrer sa maquette sous la houlette de Romanelli en profitant de la disponibilité du studio. Jeanne Moreau, en entendant le résultat, dira de Louise que c’est une chanson magnifique.

Après la fulgurance de cette première étape de création, la suite sera bien plus laborieuse. La tournée des maisons de disques est décourageante, pas parce qu’on trouve le titre mauvais, au contraire, mais parce que personne n’est prêt à parier sur le succès d’un morceau aussi atypique et si éloigné des courants du moment. Contre toute attente, c’est Claude Carrère, contacté par Frank Thomas, qui va sortir le disque. Il est vrai qu’entre Sheila, Ottawan, F.R. David ou Julie Pietri, la présence de Louise au catalogue du fameux producteur a de quoi surprendre. Mais la chanson lui plaît, ainsi qu’à son équipe qui va faire en sorte de défendre le 45t. Et sur les radios, c’est à la demande des auditeurs que les rotations vont s’accélérer.

Véritable OVNI musical dans le paysage français de ce printemps 1982, Louise, avec son instrumentation très sobre, très économe, fait la part belle au texte, hommage à la chanson réaliste. En 4 mn 30 d’une interprétation habitée, Berliner narre le destin tragique d’une jeune femme du peuple pendant la guerre. Un texte dense qui capte irrémédiablement l’attention de l’auditeur par sa noirceur poignante. Invité sur les plateaux de télévision, Gérard Berliner met à profit ses talents de comédien et livre des prestations vibrantes, refusant le playback qui pourrait nuire à l’émotion.

Louise va se faire une place dans les hit-parades jusqu’à devenir l’un des tubes de l’été 1982, entre Il tape sur des bambous de Philippe Lavil et 28° à l’ombre de Jean-François Maurice, même s’il est vrai que cet été-là caracole également en tête des ventes Les Corons de Pierre Bachelet. En tout, plus de 400 000 singles de Louise trouveront preneurs et une version italienne sera même enregistrée. Le chanteur se produit en première partie de Juliette Gréco, mais les 45t suivants ne renouvellent pas l’exploit de Louise (même si Voleur de mamans va dépasser les 100 000 ventes en 1983).

Il continue cependant d’enregistrer jusqu’à la fin des années 90. Il décroche ensuite quelques rôles pour le cinéma ou la télévision (on le voit dans Léa Parker ou Sous le soleil) puis il monte un spectacle musical autour de Victor Hugo, avec à nouveau la complicité de Roland Romanelli, pour lequel il est nommé aux Molière en 2006. Suivra un hommage à Serge Reggiani sur scène et sur disque en 2009 avant qu’il ne succombe à une crise cardiaque l’année suivante, alors seulement âgé de 54 ans.

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