Diana Ross – Swept Away

Diana Ross - Swept Away Pop Music Deluxe

Après une décennie de tubes avec les Supremes puis une autre décennie de tubes en solo, le tournant des années 80 aurait pu être fatale à Diana Ross. Pourtant, la chanteuse américaine, libérée du carcan de la Motown, prend sa carrière en main chez RCA en 1981 et marque la rupture avec l’album Why Do Fools Fall in Love, certifié platine aux Etats-Unis. Mais petit à petit, au rythme d’un album par an, les ventes déclinent. Ross, l’album de 1983, est une déception commerciale. La diva va alors revoir sa stratégie et, en tant que productrice, faire appel à la crème des auteurs pour s’assurer un disque qui va la remettre sur les rails, là où une nouvelle génération de chanteuses parties à la conquête des charts fait rage. Lionel Richie, Daryl Hall, Bernard Edwards (de Chic), entre autres, sont recrutés pour ciseler des hits à la reine de la soul, tandis que Nile Rogers, Jeff Beck ou encore Arthur Baker font partie des musiciens.

Dix titres (dont trois reprises) sont sélectionnés pour confectionner Swept Away, un opus qui s’appréhende comme une collection de chansons plus que comme un disque homogène et cohérent. Difficile en effet de faire cohabiter une reprise orchestrale du Forever Young de Bob Dylan avec un pur tube dance-rock (Swept Away) ou encore un duo avec Julio Iglesias qui frôle le mauvais goût (All of You). Pourtant, le disque est globalement solide et présente une variété de styles et de producteurs étonnante, avec aux manettes Miss Ross qui réalise elle-même plus de la moitié du 33t.

All of You

Diana Ross All of You Pop Music Deluxe

Et en amont de la sortie de Swept Away en septembre 1984, c’est un duo paru en 45t qui va quelque peu en altérer le contenu. Le latin lover par excellence, Julio Iglesias, cherche à pénétrer le marché nord-américain avec un premier album enregistré en anglais (et dans lequel il reprend notamment Il tape sur des bambous de Philippe Lavil…). Et pour l’aider, il va demander l’aide de stars locales déjà bien établies, à savoir Willie Nelson avec qui il enregistre le tube To All the Girls I’ve Loved Before, les Beach Boys avec qui il reprend The Air That I Breathe, et Diana Ross (Barbra Streisand avait été envisagée également) avec qui il crée la ballade romantique à souhait All of You. La chanteuse accepte d’enregistrer la chanson composée par Tony Renis et Iglesias à la condition que le texte, qui ne lui convient pas, soit réécrit par Cynthia Weil. Elle enregistre sa partie vocale seule et ne rencontrera le beau Julio qu’au moment du tournage du clip qui accompagne la chanson. Ballade guimauve par excellence, où synthés et réverb s’en donnent à cœur joie, All of You est servie par une vidéo aussi kitch que ses arrangements où les deux stars se reluquent et se cherchent au milieu d’une orgie de brushings proéminents et de maillots de bains échancrés. Sorti chez Columbia (le label d’Iglesias) en juin 1984, All of You s’avère être rapidement un succès et monte jusqu’à la 19e place du Billboard tandis qu’en France le 45t apparaît au tout premier Top 50 du 3 novembre 1984 en 27e position. Face à ce succès, RCA demande à Columbia l’autorisation d’inclure All of You au nouvel album de Diana Ross, alors en cours de production, remplaçant ainsi Fight For It, le seul titre co-écrit par la chanteuse.

Diana Ross Swept Away maxi Pop Music Deluxe

Profitant de l’intérêt suscité par le duo, RCA sort dans la foulée, en août, le single Swept Away qui donne son titre à l’album. Ecrit par Daryl Hall et Sara Allen, le morceau est un parfait mélange de rock, funk et dance qui prouve que la quarantenaire est toujours dans le coup. Co-produit par Arthur Baker qui est en train de se faire un nom en remixant Cyndi Lauper et Bruce Springsteen, Swept Away est l’une des grandes réussites du disque et n’a rien à envier aux productions du moment. Le clip, réalisé par Dominic Orlando, reprend le thème de la chanson, à savoir celui d’une femme qui découvre la tromperie de son amant et se venge, et bénéficie également d’un montage de près de huit minutes reprenant la version longue du morceau. Réalisée par Arthur Baker, avec l’aide des DJ The Latin Rascals, cette dernière permet à Swept Away de prendre la tête du classement des titres les plus diffusés dans les discothèques américaines. Au classement général le single se débrouille mais ne dépasse pas la 19e place et ses performances en Europe ne seront pas meilleures. Dommage d’être passé à côté d’un morceau qui aurait pu devenir emblématique des années 80 et sur lequel la chanteuse délivre une performance vocale remarquable, tout comme l’arrangement des chœurs, diablement efficace.

Diana Ross Touch By Touch Pop Music Deluxe

Tout juste un mois plus tard c’est l’album qui sort, suivi de près par Touch by Touch, un single qui n’est pas distribué aux Etats-Unis mais réservé à la promotion internationale du disque, majoritairement l’Europe. Concocté par Arthur Barrow, Joe Esposito et Richie Zito, trois auteurs en vue qui ont œuvrés pour Irene Cara, Janet Jackson ou Donna Summer, Touch by Touch offre une touche exotique et funky ponctuée de marimbas, et Miss Ross une interprétation enlevée qui font de la chanson l’un des meilleurs moments de l’album. Le 45t obtient une 7e place en Belgique et marchera également en Scandinavie avec une 10e place obtenue en Norvège et une 11e en Suède. Une version longue et une version longue instrumentale sont réalisées par Chris Lord-Alge (juste avant qu’il ne devienne très en vogue en travaillant avec Madonna, Prince, Tina Turner, Bruce Springsteen…) et un 45t picture est édité pour le Royaume-Uni (où la chanson ne dépasse pas la 47e place des charts). En 1987, invitée à présenter la cérémonie des American Music Awards, la chanteuse ouvrira la soirée avec cette chanson festive, dans un numéro mêlant danseurs et artistes de cirque parfaitement exécuté.

Missing You

L’extrait suivant, qui paraît aux Etats-Unis mais aussi en Europe, est la ballade Missing You qui ouvre l’album. Un morceau écrit et composé par Lionel Richie, avec qui Diana avait chanté en duo sur le tube Endless Love en 1981. Vibrant hommage à Marvin Gaye, disparu le 1er avril 1984, avec qui elle avait partagé un album en 1973, Diana Ross raconte la genèse du morceau en ces termes : « C’est en fait venu d’une discussion que nous avons eue avec Smokey Robinson un soir à propos du fait que Marvin nous manquait… et ce qu’il représentait pour nous ainsi qu’à la musique. Puis, Lionel et moi, nous nous sommes mis à parler de l’importance de dire aux gens qu’on les aime tant qu’ils sont encore là. Lionel s’est servi de tout ça pour écrire cette magnifique chanson. » Lionel Richie, qui produit le titre avec James Anthony Carmichel, offre un formidable écrin à la voix de la chanteuse en lui permettant d’exprimer ses émotions avec beaucoup de sincérité et de simplicité. Le tout sur une ballade poignante avec un pont qui tranche nettement avec le reste du morceau, marquant d’une rythmique plus appuyée l’arrivée des cuivres. Un bijou qui aurait pu passer inaperçu si la chanson n’avait pas été passée durant l’hommage que Diana Ross rendit à Marvin Gaye le 28 janvier 1985 lors de la cérémonie des American Music Awards par un clip, qui servira aussi à la promotion du single, montrant des images d’archives de Gaye ainsi que d’autres stars de la Motown disparues. Le 45t, qui jusque-là se contentait d’un parcours moyen au Billboard, reprend son ascension jusqu’à la 10e place, inscrivant ainsi un nouveau classique dans une carrière déjà bien remplie. Samplé dans des morceaux de hip hop à plusieurs reprises, Missing You sera également repris par Whitney Houston. Le 45t offre une version légèrement remixée par Lionel Richie.

Diana Ross Telephone Pop Music Deluxe

Dernier extrait de l’album (la chanteuse s’attelle déjà à la préparation de son prochain LP), Telephone n’est commercialisé qu’aux Etats-Unis en mai 1985. Ecrit par Bernard Edwards (de Chic, producteur et auteur de l’album diana en 1980) et Denzil Miller (qui jouait déjà du clavier sur Muscles en 1982), le morceau est un slow r’n’b langoureux sur lequel la chanteuse minaude d’une voix aiguë et très sensuelle. Mais après trois extraits classés dans le top 20, Telephone (qui ne bénéficie pas de clip) ne pénètre pas le top 100 général, atteignant toutefois la 13e place du classement r’n’b. Une version courte est réalisée pour le 45t mais aucun remix.

Deux autres titres originaux sont créés pour l’album Swept Away. Tout d’abord Nobody Makes Me Crazy (Like You Do), écrit par les époux Robby Benson et Karla DeVito, est un morceau qui lorgne vers l’électro expérimentale et sera repris en 1986 par Karla DeVito sur son propre album Wake ‘Em Up In Tokyo. Quant à We Are the Children of the World, il s’agit d’un titre funk-rock écrit par Mary Anne Kelly et Peppy Castro aux couplets efficaces mais au refrain trop répétitif et souligné par un chœur d’enfants. Le titre sera choisi pour inclusion sur la face B du 45t Swept Away en Europe mais également sur la face B de Missing You tandis que la chanson Fight for It, écartée de l’album, se retrouvera en face B de Touch by Touch en Europe et Swept Away aux Etats-Unis.

Au rayon des reprises, It’s Your Move est une chanson écrite par le tandem responsable du tube Physical d’Olivia Newton John, Steve Kipner et Terry Shaddick. Enregistrée en 1983 par Doug Parkinson ainsi que par le groupe America dans une version plus pop, la version produite par Diana Ross est de bonne facture, dans une veine plus soul avec à nouveaux des chœurs très travaillés. Rescue Me, déjà repris par de nombreux interprètes, est un choix sans risque. Ce tube de l’Américaine Fontella Bass est n°4 au Billboard en novembre 1965 alors même que les Supremes détiennent la première place du classement avec I Hear a Symphony. Un hommage de Miss Ross à l’époque de ses premiers tubes pour une version qu’elle réalise ici elle-même et qui reste appréciable. Enfin, pour clore l’album Swept Away, la chanteuse opte pour un titre de Bob Dylan, Forever Young, qu’il avait enregistré en deux versions pour son album Planet Waves en 1974. Pour souligner l’émotion de cette ballade que Dylan adresse à son enfant, Diana enregistre son interprétation avec un grand orchestre et un solo de guitare électrique tout en livrant à nouveau une prestation vocale irréprochable.

Album intéressant par ses incursions parfois expérimentales dans différents styles musicaux, avec une volonté de s’inscrire dans l’air du temps, Swept Away offrira à son interprète-productrice un nouveau disque d’or pour 500 000 ventes en seulement quelques mois aux Etats-Unis avec pour meilleur classement une 26e place au Billboard. En France, même si Diana Ross accorde quelques interviews à la télévision en 1984 à l’occasion de la ressortie du film The Wiz (qui surfe sur la présence de Michael Jackson, désormais immense star, alors que le film date de 1978), le disque ne connaîtra pas le succès, et seul All of You sera classé au Top 50. L’album de Julio Iglesias dans lequel la chanson est également incluse sera lui disque d’or en 1985. Il faudra attendre 1986 et le tube Chain Reaction écrit par les Bee Gees pour que Diana Ross signe un nouveau succès chez nous.

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