Buzy – Cheval fou

Buzy Cheval fou Pop Music Deluxe

Jamais un album de Buzy ne s’était fait attendre aussi longtemps : neuf ans depuis le précédent, Au bon moment, au bon endroit. Il faut dire que, désormais psychothérapeute depuis presque vingt ans, Marie-Claire n’était pas sûre d’avoir envie de se jeter à nouveau dans la folie de la création d’un album et d’en assumer tous les postes, seule façon de le faire exister aujourd’hui. Elle est pourtant bel et bien de retour, comblant ainsi nos attentes par ce Cheval fou superbe, élégant et tout aussi Rebel que son album éponyme qui fête cette années ses trente ans.

Cheval fou, neuvième album de Buzy, nous transporte à nouveau dans l’univers rock de la chanteuse auquel elle donne cette fois une couleur « poétique et politique ». Une observation du monde d’aujourd’hui à travers ses facettes les plus cruelles, effrayantes et révoltantes : une somme suffisante de frustrations emmagasinées pour inspirer à nouveau la plume de la chanteuse sur les dix chansons qui composent l’opus. On peut y voir aussi une sorte de bilan de carrière puisqu’on y retrouve çà et là des clins d’œil à son répertoire passé, sans jamais toutefois inspirer la nostalgie.

Sur le flamboyant Cheval fou notamment (premier extrait de l’album), on ne peut s’empêcher de repenser aux plus belles envolées de l’album BorderLove (2005) qui signait déjà un retour après une longue absence. Sur un texte qui joue sur la notion de domination dans les rapports hommes/femmes, le fougueux destrier reste épris de liberté, même si finalement il s’avère que cette recherche de liberté peut s’effectuer à deux. Chevaux sauvages chantait-elle déjà il y a plus de dix ans sur une composition de Jay Alanski…

Autre joli moment du disque, l’écolo Où vont mourir les baleines où, sur un texte fataliste et sombre qui questionne aussi notre passivité face à la question des migrants (« Comment fermer les yeux demain, Mourir d’aveuglement demain »), Bertrand Belin plaque une composition et des arrangements pop et légers, euphorie du désespoir et belle réussite.

Buzy Cheval fou vinyleMurmures, sur le renfermement de nos sociétés sur elles-mêmes, où la chanteuse rappelle les terribles heures du rideau de fer à notre humanité qui n’apprend rien (et où elle s’amuse à glisser une référence à L’Enfant barbelé de son premier album en 1981) se termine sur une note d’espoir rebelle : « Construire des ponts contre les murs »…

Sur Prière, Buzy invite la comédienne Anna Mouglalis à lui donner la réplique par un jeu d’alternance parler/chanter, et les deux voix aux timbres similaires se confondent et se mêlent étrangement en un dialogue intérieur métaphysique (« Le temps n’est que l’infinie loi, Qui te rapproche de toi »).

La perte de son frère il y a quelques années à inspirer à la chanteuse l’émouvant Cosmic Brother (« Oui c’est dur d’exister, Quand on en perd l’idée ») qui ferme le disque sur une composition d’Hervé Paul parsemée d’accents électroniques.

Lignes brisées nous ramène quelques années en arrière puisqu’une première version avait déjà été enregistrée sur Rêve éveillé en 1993 sur des arrangements de Claude Sacre. En 2019, la version Dimitri Tikovoï (qui, après avoir travaillé avec Guesch Patti, Lio et Buzy dans les années 90, s’est illustré auprès de Placebo, Sophie Ellis-Bextor et Marianne Faithfull) a gagné en âpreté et en relief, offrant au morceau un supplément de caractère, une mélodie revisitée et un deuxième couplet complètement réécrit.

Enfin, le joli Journée nuages composé par Arnold Turboust nous promène sur le chemin de la vie entre doute, espoir et remise en question.

On retrouve sur ce Cheval fou une Buzy à son meilleur et qui a, manifestement, toujours sa place dans le rock français d’aujourd’hui. Ne manque plus maintenant que la scène… et la chanteuse vient justement d’annoncer une date le 7 septembre à Cannes ! A suivre…

L’album Cheval fou est en bacs depuis le 14 juin 2019 en CD et vinyle, également en commande sur le site de Buzy !

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