1983-1986 : Les années italo-disco

Italo Disco Pop Music Deluxe

Courant indissociable des années 80, l’italo-disco prend sa source en partie dans les expérimentations électroniques de Giorgio Moroder de la fin des années 70.
La musique disco telle qu’on l’a connue avec ses envolées de cordes et ses instrumentations acoustiques est en perte de vitesse et le genre va muter, s’adaptant aux nouvelles tendances des discothèques européennes. Quelques musiciens italiens vont se lancer dans des productions qui font évidemment la part belle aux synthétiseurs, mais également aux mélodies chantées, bien souvent en anglais (quelquefois plus ou moins approximatif), et bien sûr aux boîtes à rythmes. Une autre particularité des productions italo-disco est qu’on prend soin de l’emballage des morceaux en engageant de jeunes hommes et femmes au physique agréable (mais aux capacités vocales parfois hasardeuses) afin de promouvoir des disques sur lesquels ce sont d’autres chanteurs qu’on entend.
L’italo-disco prend son véritable essor au début de la décennie et va connaître son apogée en 1985, année où l’on recense le plus grand nombre de productions du genre qui s’estompera à la fin des années 80, laissant place à de nouveaux courants.
Petit panorama en dix tubes essentiels.

Gazebo – I Like Chopin (1983)

Gazebo - I Like Chopin Pop Music Deluxe

Pionnier de l’italo-disco, le producteur Pierluigi Giombini rencontre le chanteur Paul Mazzolini après avoir passé une annonce dans un magazine. A la recherche d’un vocaliste pour un groupe qu’il souhaite monter, il est séduit par la voix du jeune homme avec qui il commence à écrire des chansons. Leur première production, Master Piece, publiée sous le nom de Gazebo, est un succès encourageant en Suisse et en Allemagne. Mais le meilleur reste à venir et, après avoir produit le méga tube Dolce vita pour Ryan Paris, Gazebo s’apprête à pulvériser les charts avec un nouveau hit. Amateur de musique classique, Giombini a laissé traîner une partition sur son piano, un morceau de Chopin. Aussitôt inspiré par le nom du musicien, il compose ce qui va devenir I Like Chopin, une ballade très mélodique sur laquelle Mazzolini, qui étudie la littérature, greffe un texte un peu opaque et mystérieux. Mais la première version du morceau, très orchestrale, ne convainc pas la maison de disques qui souhaite un son plus électronique et il faudra refaire la production quatre fois avant d’arriver au résultat qu’on connait, développé à partir de la version longue de la chanson dont l’introduction inspire particulièrement Giombini. I Like Chopin sera n°1 en Allemagne, Autriche, Suisse, n°2 en Italie et se vendra à plus de 500 000 exemplaires en France.

Righeira – Vamos a la playa (1983)

Righeira - Vamos a la playa Pop Music Deluxe

Duo italien formé au début des années 80, Righeira (Stefano Rota et Stefano Righi) est présenté aux frères La Bionda, autres pionniers de la musique électronique en Italie, qui cherchent des chanteurs au look atypique pour l’émission musicale qu’ils produisent à cette époque. Mais les garçons de Righeira ont surtout envie d’écrire des morceaux et ils leur présentent la maquette de Vamos a la playa, un titre à l’ambiance un peu obscure dont le texte dénonce les méfaits du nucléaire (« Allons à la plage, Tous avec un chapeau, Le vent radioactif, Décolore les cheveux… »). Séduit par cette composition, La Bionda va lui insuffler une touche un peu plus festive faisant passer la chanson, dont les paroles en espagnol sont incompréhensibles pour une partie de l’Europe, pour un tube d’été frivole. L’Europe dansera donc, sans forcément s’en douter, sur cette italo-disco au texte très sombre qui cartonne en 1983 et séduit plus de 200 000 acheteurs en France. Le single suivant, No tengo dinero, sera lui aussi un succès.

Ryan Paris – Dolce vita (1983)

Ryan Paris - Dolce vita Pop Music Deluxe

C’est Paul Mazzolini qui incite Pierluigi Giombini à écrire une chanson inspirée du titre du film de Fellini. Le duo responsable du succès de I Like Chopin va donc écrire Dolce vita qui sera confié à Fabio Roscioli, futur Ryan Paris. Musicien et chanteur aux influences plutôt rock, ce dernier est abordé par Giombini qui aime sa voix et lui fait écouter ses dernières productions. Roscioli se laisse convaincre et enregistre Dolce vita. A l’inverse de Chopin, tout va cette fois se mettre en place très rapidement et le morceau est enregistré en un temps record. Mais Baby Records, qui a signé Gazebo, ne veut pas du disque. Giombini se tourne alors vers le label milanais Discomagic Records, qui n’a pas encore acquis sa réputation de plus important distributeur d’italo-disco, et Dolce vita va très vite devenir un immense succès. N°1 en Belgique et aux Pays-Bas, n°2 en Autriche, Suède et Norvège, n°3 en Allemagne et Suisse, ce sera l’un des rares tubes italo-disco à marcher au Royaume-Uni où il se classe 5e et sera couronné d’une prestation de Ryan Paris à Top of The Pops. La France n’est bien sûr pas en reste et Dolce vita sera n°1 des discothèques et s’écoulera à plus de 600 000 copies. Gazebo sortira sa propre version de Dolce vita en 1988, mais sans succès.

P. Lion – Happy Children (1983)

P. Lion - Happy Children Pop Music Deluxe

Musicien depuis son plus jeune âge, Paolo Pelandi compose et écrit en anglais. Au début des années 80, alors que les productions italiennes en anglais commencent à se développer, il enregistre une cassette démo et se met à la recherche d’un producteur. Il fait la connaissance de David Zambelli (qui signera par la suite les succès de Scotch, Silver Pozzoli et Finzy Kontini), qui habite tout près de chez lui dans la région de Bergame, et ensemble ils mettent en boîte une première version de Happy Children en deux ou trois soirées dans le petit studio bricolé par Paolo. Ils enregistrent ensuite la version définitive du morceau, qui variera peu, dans un studio professionnel à Milan. Paolo, qui signe paroles et musiques, joue du synthé et assure les voix, prend le pseudonyme de P. Lion et le disque sort sur le petit label American Disco, géré par Severo Lombardi, également basé à Bergame. Classé 5e en Belgique, 11e en Suisse, 15e en Allemagne et aux Pays-Bas, Happy Children, sa rythmique et son saxophone envoûtants, atteignent les 300 000 ventes en France. L’artiste deviendra vite une figure indissociable du Top 50 puisque son single suivant, Dream, est choisi comme générique de l’émission musicale.

Sandy Marton – People from Ibiza (1984)

Sandy Marton - People from Ibiza Pop Music Deluxe

Né en Croatie, Sandy Marton étudie le piano pendant dix ans. A vingt ans, il part à Milan pour étudier le design et fréquente les discothèques du coin où un soir il fait la connaissance du producteur Claudio Cecchetto qui, subjugué par le physique du grand blond, lui annonce qu’ils vont faire un disque ensemble. Ce sera Ok. Run en 1983 publié sous le nom M Basic et sur lequel Sandy n’est impliqué que par la présence de sa photo sur la pochette. Il convainc cependant par la suite le producteur de le laisser essayer d’écrire des chansons mais le résultat n’est pas probant, jusqu’à ce qu’il lui amène en désespoir de cause le titre People from Ibiza, inspiré de l’île où il se rend souvent pour faire la fête. En producteur aisé, Cecchetto permet à Marton de prendre le temps de peaufiner ses disques sur le meilleur matériel et avec les meilleurs arrangeurs. People from Ibiza devient un tube européen en 1984. Sandy n’a pas la prétention ni l’envie d’en faire son métier mais, poussé par Cecchetto, il poursuit tout de même l’aventure et Exotic and Erotic en 1986 est lui aussi un succès qui se classe 17e au Top 50.

Valerie Dore – The Night (1984)

Valerie Dore - The Night Pop Music Deluxe

Valerie Dore est le projet de deux producteurs italiens : Roberto Gasparini et Lino Nicolosi. Ce dernier vient de former le groupe Novecento avec son frère Pino, sa sœur Rossana et la chanteuse Dora Carofiglio. Avec Movin’ On, son premier single en 1984, Novecento est n°1 en Italie. Le groupe enregistre parallèlement la chanson The Night avec la collaboration de Roberto Gasparini mais se retrouve confronté à un problème : à l’époque en Italie, un groupe ne peut pas être classé dans les charts avec deux morceaux différents. Gasparini propose alors de créer un projet parallèle autour de la chanson (interprétée par Dora Carofiglio) avec l’aide de son amie Monica Stucchi, chanteuse d’un groupe de bluegrass, qui accepte de promouvoir l’image du projet Valerie Dore sur les photos, les prestations télé et les clips. The Night, avec ses ambiances mélodiques éthérées et ses vocalises haut perchées, sort également en 1984 et fait mieux que Novecento en dépassant cette fois les frontières. Classé n°5 en Allemagne, n°8 en Suisse, le 45t sera 23e au Top 50 en mai 1985 et n°2 en discothèques. Get Closer, qui reprend la même formule quelques mois plus tard, sera un nouveau succès. Monica Stucchi continuera par la suite à incarner Valerie Dore jusqu’à aujourd’hui.

Lune de miel – Paradise mi amor (1984)

Lune de miel - Paradise mi amor Pop Music Deluxe

La France aussi se lance dans l’italo-disco et Lune de miel débarque en 1985 avec Paradise mi amor, un projet piloté par le producteur Frédéric Partouche mais écrit et composé par deux membres du groupe Century, Jean-André Duperron et Jean-Louis Rodriguez (alias Jean-Louis Milford). Ce dernier prêtera également sa voix à la chanson mais sans en être crédité puisqu’il s’apprête à lancer la ballade rock Lover Why avec son groupe (qui restera n°1 du Top pendant sept semaines !). Le producteur fera donc appel à Jean Franvil (DJ et danseur) ainsi qu’à trois choristes-danseuses pour représenter le groupe et Paradise mi amor devient un tube à l’été 1985 : n°5 au Top, 600 000 exemplaires vendus. La même année, la chanson est reprise par Paradiso (version produite par les Italiens David Zambelli et Walter Verdi) ainsi que par Vanilla (produite par Harry Baierl et Helmut Rulofs).

Tony Esposito ‎– Kalimba De Luna (1984)

Tony Esposito - Kalimba de luna Pop Music Deluxe

L’Italien Tony Esposito s’intéresse aux rythmes et aux instruments africains. Il publie des albums entre jazz, rock progressif et afrobeat dans les années 70 avant de s’imprégner du courant italo-disco qui commence à envahir l’Europe. C’est à la suite d’un séjour au Nigeria qu’il va composer Kalimba de luna, inspiré par cet instrument d’Afrique subsaharienne qu’il vient de découvrir. Pour enregistrer les parties vocales du morceau, il fera appel à Gianluigi Di Franco, un musicien napolitain. Publié en mai 1984, Kalimba de luna est présenté au festival Un disco per l’estate qu’il va remporter. Classé 6e en Suisse, 12e en Autriche et 25e en Italie, le morceau est instantanément repris par Boney M. qui en fait un tube et les deux versions se retrouvent en compétition dans les charts au même moment. Mais c’est l’interprétation de Boney M. qui remportera globalement les meilleurs scores, atteignant la 6e place de notre Top 50. La même année, le morceau est également repris par Dalida, Macho et Pepe Goes to Cuba.

Baltimora – Tarzan Boy (1985)

Baltimora - Tarzan Boy Pop Music Deluxe

Projet formé par le producteur italien Maurizio Bassi et l’Irlandais Jimmy McShane, Baltimora publie son premier 45 tours, Tarzan Boy, en 1985. Bassi est un musicien et arrangeur qui a travaillé sur de très nombreux morceaux disco dès la fin des années 70. Il fait la connaissance de McShane alors que celui-ci a quitté son Irlande du Nord natale pour faire des chœurs sur la tournée européenne de Dee D. Jackson. Bassi cherche un jeune homme pour son nouveau projet et l’Irlandais, avec son charisme et ses aptitudes scéniques, semble parfait pour le rôle. Tarzan Boy est enregistré et, aujourd’hui encore, le flou subsiste quant à l’identité du véritable vocaliste du morceau. La particularité de la chanson est son refrain construit à partir du fameux cri de Tarzan. C’est en France que Tarzan Boy marchera le mieux, squattant la 1ère place du Top 50 pendant cinq semaines, il sera également n°1 des discothèques et totalisera plus de 700 000 ventes. N°1 en Belgique et aux Pays-Bas, n°2 en Autriche et en Suède, Tarzan Boy est l’un des rares morceaux d’italo-disco à fonctionner aux Etats-Unis où il prend la 13e place du Billboard. Jimmy McShane nous quittera en 1995, emporté par le Sida.

Spagna – Easy Lady (1986)

Spagna - Easy Lady Pop Music Deluxe

Même si petite fille Ivana Spagna se rêve danseuse, c’est un groupe de musique qu’elle forme à 18 ans avec son frère et quelques amis. Ensemble, ils écument les discothèques italiennes où ils rejouent les succès disco du moment. Petit à petit, ils incluent leurs propres compositions à leur set et montent un petit studio d’enregistrement à domicile. Demandée comme autrice et vocaliste, Ivana Spagna écrit pour de nombreux projets italo-disco mais aussi pour elle-même (sous le pseudo Yvonne Kay notamment). Elle sera la voix de Fun Fun avec son amie Antonella Pepe, duo dont la promotion est assurée par deux mannequins et connait plusieurs succès. De quoi donner à Spagna le courage de se lancer sous son nom avec Easy Lady, concocté avec son petit ami et son frère qui lui suggéra d’en simplifier le refrain en répétant quatre fois « lady » à la place du texte un peu trop compliqué qu’elle avait écrit. Premier tube de Spagna en 1986, Easy Lady sera n°4 au Top 50 et s’écoulera à plus de 300 000 exemplaires.

Playlist :

2 commentaires

  1. J’adore ce genre de musique, mais (curieusement ?), je n’accroche pas à tous ces titres. J’en trouve certains super mous (« I like Chopin », « Dolce Vita »). Je pensais d’ailleurs que l’italo-disco (italo-dance ?) était plus rythmée, plus dynamique, à l’instar du « Easy Lady » de Spagna. Mais j’aurais du mal à définir ce style et donner des exemples que tout le monde connait (à part Spagna et Sabrina).
    D’ailleurs, voici des titres que j’adore, et que j’ai connus sur le tard (titres pas diffusés en France ?), grâce à des forums comme topmoumoutte. Les classeriez-vous en italo-disco ? « Charlene » (Roxane) ; « Last summer » (Wishkey) ; « Dance to dance » (Hands of Love) ; « Ocean of crime » (Stage / Prime Time) ; « Only music survives » (Alba) ; « Let’s dance » (David Gray) ; « Shot in the night » (Saphir) ; « Silent smiles » et « Sunshine Love » (Anthony’s Games). Et que dire de « Brick » (Fake) et « Engel 07 » (Hubert Kah) ??

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  2. Pas forcément tous, par exemple Alba oui, mais ni Fake, ni Hubert Kah. Synthpop, euro disco, Hi-NRG… il y avait aussi d’autres courants qui se rejoignaient parfois, inévitablement.

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