Alors que Pink Floyd cède sa première place à Madness en ce mois de mars 1980, le rap fait son apparition avec Sugarhill Gang, le disco entêtant de François Valéry fait recette tandis que Plastic Bertrand surnage et que Marianne Faithfull s’apprête à revenir avec un très grand album…
Sugarhill Gang – Rapper’s Delight
L’un des tout premiers tubes hip-hop, Rapper’s Delight est le premier single de Sugarhill Gang, un trio masculin fabriqué par la productrice Sylvia Robinson qui a eu bien du mal à trouver des rappeurs qui accepteraient d’enregistrer, ces derniers considérant en effet que le rap était réservé à la performance live. En 1978, lors d’un concert de Chic, les membres de Sugarhill Gang s’invitent sur la scène le temps d’une impro sur le tube Good Times. Quelle ne fut pas la surprise de Nile Rodgers lorsqu’il entendra quelques semaines plus tard la ligne de basse de Good Times sur un autre morceau ! Une première version de Rapper’s Delight qui, après menaces juridiques, verra Nile Rodgers et Bernard Edwards de Chic crédités sur le disque qui sort aux Etats-Unis uniquement en maxi 45 tours dans une version de près de 15 minutes enregistrée en une seule prise. En France, la version 45 tours réduite à 4 minutes dépassera les 300 000 ventes.
Madness – One Step Beyond
Baptisé Madness en hommage à un morceau du Jamaïcain Prince Buster, ce groupe de musiciens londoniens se lance en 1979 avec un premier single qui se fait remarquer en Angleterre. Mais c’est avec One Step Beyond, le suivant qui ouvre également le premier album du groupe de ska, que Madness connaît un succès fulgurant. Madness choisit de reprendre une face B instrumentale de Prince Buster et d’en faire un nouveau morceau agrémenté de quelques paroles piochées ici ou là. Sorti en 1979, le 45 tours propose en fait une version de travail que la maison de disques s’est empressée de faire graver alors que les producteurs du morceau avaient prévu d’en faire un remix. N°7 au Royaume-Uni, One Step Beyond se vend à plus de 600 000 exemplaires en France, et une version espagnole (Un paso adelante) ainsi qu’une version italienne (Un passo avanti) seront enregistrées pour capitaliser sur la popularité du titre à l’étranger.
François Valéry – Emmanuelle
Après les succès d’Une chanson d’été, Dînons ce soir en amoureux et Qu’est-ce qu’on a dansé sur cette chanson, le romantique François Valéry se lance dans la disco avec Disco Brasilia en 1979 puis Emmanuelle qui, début 1980, devient son plus gros succès en s’écoulant à plus de 300 000 exemplaires. Pierre Delanoë en signe le texte tandis que le chanteur en compose la musique mais les journaux de l’époque préfèrent manifestement énumérer la liste de ses conquêtes plutôt que de parler de ses chansons. « Mes producteurs de l’époque pensaient que je n’étais qu’un chanteur gadget et qu’avec ma belle gueule, je n’allais durer qu’un seul été. Mais j’ai eu la chance de connaître le succès tôt, et de vivre de mon métier depuis », confie-t-il à Nice Matin en 2019. Emmanuelle aura droit la même année à une version enregistrée en italien sur un texte adapté par Paolo Dossena (le spécialiste des adaptations pour Hallyday, Vartan, Barrière, Dalida, Sheila…).
Marianne Faithfull – The Ballad of Lucy Jordan
Sorti en novembre 1979, Broken English est l’album de la renaissance artistique de Marianne Faithfull. Après une longue période de décadence où la chanteuse est au plus bas, c’est un succès inattendu en Irlande avec un album country qui la remet sur les rails et lui permet de partir en tournée, l’occasion d’écrire de nouveaux morceaux avec ses musiciens. Une bande démo attire l’oreille de Chris Blackwell qui la signe chez Island où elle enregistre Broken English. Mais une fois le disque terminé, le réalisateur Mark Miller Mundy suggère de le remixer en lui donnant une couleur plus new wave. The Ballad of Lucy Jordan (écrite par Shel Silverstein pour le groupe Dr. Hook & the Medicine Show en 1974) en est le premier extrait : « Lucy Jordan, c’est moi si ma vie avait pris un autre tournant, si j’étais devenue Mme Gene Pitney par exemple et que je m’étais retrouvée dans une grande maison vide du Connecticut. C’est une chanson qui s’identifie à celles qui sont coincées dans ce genre de vie et la vraie horreur que représente cette « belle vie », celle à laquelle les femmes sont censées aspirer », expliquera la chanteuse. Un petit film promotionnel incluant trois chansons, dont Lucy Jordan, sera réalisé par Derek Jarman pour lancer l’album. Lucy Jordan est un petit succès en France en 1980, et l’album dépasse les 200 000 ventes.
Plastic Bertrand – Le monde est merveilleux
Sensation belge de la fin des années 70, Plastic Bertrand n’est pas qu’un « coup » et continue à sillonner la planète au début des années 80 avec une série de tubes (Tout petit la planète, Sentimentale moi…). A la base, il s’agit bien sûr d’un énième canular du facétieux producteur Lou Deprijck qui, voulant se moquer des punks avec Ça plane pour moi qu’il compose puis enregistre en déguisant sa voix, choisit Roger Marie François Jouret, alias Plastic Bertand, pour en interpréter le personnage. Plastic assurera son rôle à la perfection, et révèlera par la suite d’autres talents, dont celui d’animateur à la télévision française, belge et italienne au début des années 80. Entre deux albums, Plastic Bertand sort Le monde est merveilleux en 1979, une chanson anti déprime et naïve à souhait, concoctée par Jay Alanski, qui va connaître un petit succès en France en février 1980. La face B, J’te fais un plan, est une nouvelle orchestration du morceau paru l’année précédente sur l’album du même nom. Les deux chansons seront au programme de la première compilation de Plastic Bertrand qui paraît peu de temps après.
45 tours sélectionnés à partir des classements réalisés par le blog Charts singles Top 50 en France.
Voir aussi : Les succès de 1980 (2).