Révélé au grand public au tout début de l’année 1984 grâce à un passage dans l’émission culte anglaise Top of the Pops, les cinq anglais de Frankie Goes to Hollywood font sensation avec le flamboyant Relax et son parfum de scandale qui, poussé sans doute par une censure tardive de la BBC, s’installe en haut des charts pendant plusieurs semaines. L’imagerie ouvertement gay, cuir et érotique du groupe, dont le côté marketing tranche avec l’activisme de Bronski Beat à la même époque, n’est pas du goût de tout le monde. Pourtant Frankie signe deux des plus gros tubes de l’année avec Relax suivi de près par Two Tribes.
Issus de la scène de Liverpool, les cinq garçons, menés par le chanteur Holly Johnson, se font repérer lors de l’une de leurs premières performances télé par le producteur Trevor Horn qui vient de lancer son label ZTT. Des enregistrements avec le groupe, le producteur ne retiendra quasiment que la voix de Holly Johnson et reconstruira lui-même, aidé de ses ingénieurs du son, les morceaux qui composeront le premier album de FGTH, le double LP Welcome to the Pleasuredome.
Pour le troisième single du groupe, le choix se porte sur la ballade The Power of Love. Une première version du morceau est enregistrée fin 1983 pour une John Peel session sur BBC Radio 1. Holly Johnson se souvient d’avoir utilisé un texte qu’il avait écrit dans un journal que son père lui avait offert et d’avoir adapté les paroles au morceau. Inspiré par l’amour, thème universel, il délivre un texte spirituel, évoquant une force divine.
Au moment d’enregistrer The Power of Love pour l’album, Trevor Horn demande à Anne Dudley du groupe Art of Noise d’écrire un arrangement pour cordes qu’elle dirigera lors d’une session d’enregistrement aux studios CTS. Lors du mixage, le morceau sera accéléré d’un demi-ton afin de le raccourcir pour les radios, ce qui chagrinera Holly Johnson qui réenregistrera la ballade en 1999 pour son propre album solo.

Commercialisé en novembre 1984 alors que FGTH est en tournée aux États-Unis, la maison de disques commande un clip au duo Godley & Creme (Visage, Duran Duran, Culture Club…) avec l’idée de faire de The Power of Love un tube de Noël. Avec ses paroles empreintes de mysticisme, la chanson est affublée d’une vidéo dépeignant la Nativité dans laquelle les cinq musiciens n’apparaissent pas. A la demande de Top of the Pops, qui refuse de diffuser le clip si l’on n’y voit pas le groupe, un cadre doré dans lequel figurent les garçons est incrusté à la vidéo originale. Avec une pochette qui reprend le visuel de L’Assomption de la Vierge de Titien et même un 45t picture sur lequel les photos du groupe sont entourées de houx, The Power of Love entre dans la course au n°1 de Noël, une tradition britannique.
Annoncé comme le troisième n°1 consécutif de FGTH avant même sa sortie, le single se hisse en effet à la première place des charts anglais début décembre et sera délogé la semaine suivante par Do They Know It’s Christmas? du Band Aid, pour le coup vrai tube de Noël.
Deux maxi 45 tours riches de contenu sont réalisés pour The Power of Love et l’on y trouve notamment une version longue de 9 mn 30 du morceau titre, un instrumental, une version longue de Welcome to the Pleasuredome, plusieurs versions de The World Is My Oyster, un message de Noël enregistré par le groupe… Et le succès gagne l’Europe : n°2 en Suisse, n°4 en Allemagne, n°20 en France (plus de 150 000 ventes)…
Malgré la carrière éclaire de Frankie qui se sépare en 1987 après un deuxième album, son héritage continuera à vivre. The Power of Love ressort en 1993 et se classe 10e au Royaume-Uni, il reprend la 6e place en 2000 grâce à une série de nouveaux remixes, puis c’est une 42e place en 2012 avec la sortie d’une nouvelle compilation. La même année c’est la version de Gabrielle Aplin qui prend la tête des charts au moment de Noël et en 2014 ce sont les Allemands de Blank & Jones qui rendent hommage à FGTH avec l’album So80s Presents ZTT.