
Issue d’une famille de musiciens irlandais, Eithne (prononcé Enya) grandit entourée de musique. Ses frères et sœurs ont formé le groupe Clannad qu’elle va rejoindre au tout début des années 80 en tant que claviériste, percussionniste et choriste. Clannad connaît un succès croissant mais au moment du premier tube, en 1982, Enya a déjà quitté le groupe avec le manager Nicky Ryan qui souhaite développer la carrière de la jeune musicienne en solo.
Ses premiers enregistrements paraissent sur des compilations et BO de films avant qu’elle ne compose la musique du documentaire The Celts qui lui servira également de premier album en 1987. Si l’accueil est encore timide, Enya est pourtant à l’aube d’une grande carrière.
L’année suivante la jeune musicienne est signée chez WEA par Rob Dickins qui a adoré son premier album et qui l’incite à travailler sur un album vocal.
Enya se met alors à la composition de ses nouveaux titres avec Nicky Ryan à la production et sa femme Roma Ryan à l’écriture. Le trio prend son temps pour créer l’album Watermark qui sera dans les bacs en septembre 1988. Durant les sessions de travail, un titre en particulier retiendra l’attention de Rob Dickins qui, pour la blague, réclame un single à l’équipe sachant très bien que la musique d’Enya, plutôt méditative, ne se commercialise pas de la même façon qu’un album pop.
Orinoco Flow est un morceau qui arrive assez tôt dans le processus de création et tout commence par ces fameuses notes de synthé reproduisant des cordes pincées que l’on entend dans l’introduction et composées par Enya. Emballé par cet embryon de mélodie, Nicky l’encourage à aller plus loin. Le trio tourne autour pendant un bon moment, délaissant le morceau plusieurs fois avant de le reprendre. Mais le refrain arrive très vite, avec les « sail away, sail away, sail away » répétés à l’infini et déjà l’idée de la voix de la chanteuse doublée à de nombreuses reprises. La thématique du texte se construit autour de ces quelques mots et invite à prendre le large, naviguer autour du monde, tout en faisant référence à des endroits existants et imaginaires. Quelques clins d’œil y sont glissés, notamment à Orinoco (Orénoque en français), ce fleuve sud-américain qui donnera son titre à la chanson mais qui est surtout le nom du studio où est enregistré le disque, tandis que Rob Dickins se retrouve cité dans le texte en tant que capitaine du navire, métaphore de son rôle de directeur du label et donc des opérations.
Ce n’est qu’à la toute fin de la production qu’Orinoco Flow va s’imposer comme un single évident, le premier extrait de l’album Watermark, et l’introduction de la musique new age d’Enya au monde entier. Le clip réalisé par Michael Geoghegan reprend le travail effectué sur la pochette de l’album. Un seul jour de tournage devant un écran bleu sera nécessaire à la chanteuse pour plus de cinq semaines d’incrustation des décors peints à la main par une équipe de cinq artistes.
Le 45 tours sort avec une version plus courte de la chanson, rebaptisée Orinoco Flow (Sail Away) sur les pressages ultérieurs afin d’être en meilleure adéquation avec le refrain, tandis qu’en face B se trouve le titre Out Of The Blue, une version retravaillée et plus longue de Portrait, présent sur le premier album. Sur le CD single et le maxi 45t c’est la version album d’Orinoco Flow qui est préférée et on trouve également un inédit, Smaoitím…, qui sera repris en final de l’album suivant.
Le succès du morceau entêtant ne se fait pas attendre et Enya est propulsée au sommet des charts : n°1 au Royaume-Uni, en Suisse, aux Pays-Bas, n°2 en Allemagne et en Suède, n°16 en France et n°24 aux États-Unis. Une locomotive qui donne des ailes à l’album qui se vend à plus de 11 millions de copies. Un succès qui perdure encore aujourd’hui.