
L’histoire de Bad Boys Blue commence en Allemagne, et plus précisément à Cologne, au début des années 1980. C’est non loin de là, à Hennef, que Tony Hendrik et son épouse Karin Hartmann ont fondé leur propre label de musique, Coconut, en janvier 1981. Ensemble, ils ont déjà signé quelques succès disco pour le trio féminin A la carte ainsi que pour Wolfgang Petryn dans un style purement schlager. Mais en 1984, le paysage musical est en train de changer et une nouvelle tendance électro-disco émerge. Tony et Karin ont bien l’intention de prendre le train en marche et de mettre sur pied un nouveau projet. Ils ont récemment fait la connaissance d’Andrew Thomas, DJ et musicien américain installé à Cologne depuis 1976, qui assure également des chœurs pour plusieurs studios et qu’ils ont donc régulièrement l’occasion de croiser. Andrew leur présente l’un de ses amis, Trevor Taylor, qui lui est jamaïcain, puis c’est une autre de leurs connaissances, l’Anglais John McInerney, qui se joint à ce trio improvisé. L’idée est donc de faire de la dance music, et un premier morceau, L.O.V.E. in My Car, est écrit, composé et produit par Tony et Karin, avec la contribution d’Andrew et Trevor. Mais le groupe n’a pas encore de nom, et après avoir lancé l’idée de Bad Guys puis de Bad Boys, c’est Bad Boys Blue qui est finalement adopté, tout simplement parce qu’à l’époque les costumes de scène des trois garçons sont bleus (c’est d’ailleurs ainsi qu’ils apparaissent sur la pochette de leurs premiers 45 tours). Le style, entre disco et Hi-NRG, se cherche encore, et ce premier essai est un échec fin 1984.
Au même moment, c’est une autre production allemande, le duo Modern Talking, qui fait une apparition remarquée avec un énorme tube, You’re My Heart, You’re My Soul, qui prend la tête des charts allemands pendant six semaines début 1985. Fréquentant le milieu depuis plus d’une décennie, Tony Hendrik et Karin Hartmann connaissent déjà bien Dieter Bohlen (moitié de Modern Talking) pour avoir écrit et composé un morceau pour lui lorsqu’il essayait de se lancer au sein de l’éphémère duo Monza en 1978.
En 1985, le deuxième single de Bad Boys Blue, You’re a Woman, va directement s’inspirer du son et des arrangements de Modern Talking. « Je mentirais si je disais le contraire, commente Karin Hartmann en 2010. Et il n’est pas difficile de deviner que You’re a Woman était notre réponse à leur musique. Pendant le carnaval de 1985, je me suis retrouvée seule à mon bureau alors que tout le monde était déjà parti. Et c’est à ce moment-là que j’ai écrit les paroles. Au final le single était prêt au printemps de la même année. On pensait que Bad Boys Blue était une réponse multiculturelle intéressante à ces jolis garçons de Modern Talking. Le groupe était composé de trois garçons représentant différents pays et différentes cultures. C’est en ça qu’ils étaient si différents de Modern Talking, même si le son de Bad Boys Blue était directement inspiré de celui de Dieter Bohlen ».
En effet You’re a Woman, toujours signé Hendrik / Hartmann mais cette fois avec la collaboration de Mary Applegate (à qui l’on doit également le succès de The Power of Love par Jennifer Rush à la même période), s’inspire directement et sans complexes, comme le feront d’innombrables productions du moment, de la recette Modern Talking. Gimmicks synthés, refrains repris en voix de tête, le pastiche égale presque l’original et suffit pour lancer le trio à l’assaut des charts européens. Mais outre ce changement de style, on note aussi le changement de vocaliste principal puisqu’après avoir mis en avant Andrew sur L.O.V.E. in My Car, c’est désormais Trevor qui assure le lead, une idée de Tony Hendrik (Karin Hartmann quant à elle misait plutôt sur John).
Avec une version instrumentale en face B et une version longue en maxi, You’re a Woman fait son entrée dans les classements allemands fin mai 1985 et y restera jusqu’à fin octobre, culminant à la 8e place. N°1 en Autriche, n°2 en Suisse, n°4 en Belgique et n°6 en Suède, le single ne fera qu’une timide apparition d’une semaine à la 47e place du Top 50 français en novembre 1985.
Si d’autres succès suivront, ils n’égaleront jamais celui de You’re a Woman. Bad Boys Blue fait pourtant preuve d’une longévité étonnante puisque le groupe, bien que réduit à John McInerney en solo avec deux choristes, existe toujours aujourd’hui et continue à sortir des albums. La formation a bien évidemment connu de nombreux changements au fil de son histoire et en 1998, lors du revival du groupe avec des remixes, comme vient juste de le faire Modern Talking avec un succès énorme, c’est la voix de Trevor Taylor qui est toujours utilisée alors que celui-ci ne fait plus partie du groupe. You’re a Woman ressort donc dans deux nouvelles versions (dont un rap d’Eric Singleton qui vient également de participer à la version 98 de You’re My Heart, You’re My Soul…) mais se contente d’une 52e position dans les charts allemands.
Merci pour l’histoire de ce « classique » de l’italo-disco (que je n’ai cependant pas connu à l’époque, car trop jeune), qui s’écoute bien même s’il manque de profondeur et de gravité 😉 Je suis étonné de la longévité de la formation musicale, et j’avoue avoir un peu peur à l’idée d’écouter ce qu’ils ont fait depuis…
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