En 1990 Sylvie Vartan n’est pas montée sur scène à Paris depuis sept ans. Son dernier album Confidanses, paru en 1989, n’a remporté qu’un demi-succès malgré une production signée Michael Cretu (Sandra, Enigma…) et le single C’est fatal écrit par Didier Barbelivien qui deviendra un classique de son répertoire. La chanteuse de 46 ans a envie de retrouver son public mais également de le surprendre, c’est pourquoi elle fait appel au metteur en scène argentin Alfredo Arias pour la diriger dans son prochain spectacle. Son travail peu conventionnel et extravagant a séduit Sylvie Vartan qui espère qu’Arias saura s’adapter à sa personnalité. Mais les mois passent et le metteur en scène ne lui propose rien ou alors des tableaux trop farfelus et trop éloignés de l’univers de la chanteuse. À regret, elle met fin à la collaboration seulement deux mois avant le début des cinq semaines de représentations prévues au Palais des sports en janvier et février 1991. Pas du genre à se laisser abattre, Sylvie retrousse ses manches et prend en charge en urgence le montage de son nouveau show grâce à l’aide de son mari Tony Scotti.

En dernière minute c’est Jerry Evans qui met en scène et chorégraphie le spectacle (il a notamment travaillé avec Paula Abdul) dans un décor de hangar désaffecté. Pour le choix des chansons, Sylvie se fait aider de son ami Étienne Daho qu’elle a rencontré par l’intermédiaire de son chef de produit chez Phonogram. En grand fan de la chanteuse, Daho lui conseille de reprendre ses anciens succès qu’elle n’a pas chantés depuis longtemps. Irrésistiblement, Par amour, par pitié, La Maritza… seront donc du programme tout comme Quand tu es là que Sylvie a enregistré en 1965.

Dans sa version originale, The Game of Love est interprété par Wayne Fontana and the Mindbenders et c’est un énorme succès au Royaume-Uni (n°2) et aux États-Unis (n°1). Sylvie en présente donc sa propre version quasi immédiatement et l’original, écrit et composé par Clint Ballard Jr, est adapté en français par Franck Gérald qui a travaillé avec les plus grands (Bécaud, Hardy, Dalida…). Au même moment Les Surfs en proposent une autre version intitulée Pour une pomme, au succès beaucoup plus anecdotique. En 2012 la version de Sylvie sera utilisée pour la bande originale du film américain Elle s’appelle Ruby avec notamment Antonio Banderas.

À la rentrée 1990, c’est une nouvelle version de Quand tu es là réalisée par Étienne Daho que l’on retrouve dans les bacs des disquaires. « Étienne Daho l’aimait beaucoup, racontera Sylvie, et c’est vrai que les chansons d’une certaine époque avaient beaucoup de mélodie, beaucoup de rythme et de punch. C’est une chanson qu’il avait envie de refaire et il m’en a donné l’idée. Comme ça tombait bien et que j’aimais beaucoup cette chanson on l’a refaite. Il a refait les arrangements, les voix et on a eu beaucoup de plaisir à faire ce disque ensemble parce qu’on s’apprécie mutuellement en plus et on est amis donc c’est une expérience très agréable qu’on va renouveler certainement. »¹

Daho entraîne avec lui sa bande d’amis musiciens pour produire cette nouvelle version, notamment son complice Arnold Turboust à la programmation et Édith Fambuena à l’harmonica. Tout en conservant l’esprit 60’s de l’originale, la version 90 de Quand tu es là est plus moderne mais tout aussi efficace. « Sylvie voulait que je fasse une chanson inédite et moi je n’avais rien à lui proposer. Je n’avais pas de temps et elle était pressée… (…) On a enregistré très vite, ce fut un rêve d’enregistrer avec elle. Je commençais à pratiquer les artistes en studio. J’avais travaillé avec des artistes pas simples à gérer et là j’avais une star, une vraie, qui, quand elle est là, donne beaucoup. (…) Elle chantait avec la voix que j’aime, rauque, quand elle se casse »², se souviendra Étienne Daho. En plus d’un 45 tours, la chanson sort également en maxi 45 tours et maxi CD. Une version maxi rallonge de presque deux minutes Quand tu es là tandis que pour la face B Sylvie reprend Silver Mac, un morceau du groupe anglais Westworld qui a obtenu un petit succès en 1987, toujours sur les conseils d’Étienne.

L’automne 1990 est également un moment important dans la carrière de la chanteuse puisqu’elle s’apprête à retrouver la Bulgarie, son pays natal, pour y donner un concert pour la toute première fois. Le 6 octobre, elle est sur la scène du Palais de la Culture de Sofia pour des retrouvailles chargées en émotions. Parmi de nombreux succès, Quand tu es là figure en bonne place de la setlist et le concert donne lieu à une couverture médiatique importante en France et fait l’objet d’un reportage pour Envoyé spécial tandis que le spectacle est retransmis sur Antenne 2 le 24 décembre.

Outre de nombreux passages télé pour promouvoir son single, Sylvie tourne un clip délicieusement rétro dans lequel elle n’hésite pas à reprendre les codes qui ont fait son succès. Manifestement le retour de la star à ses premières amours ne laisse pas indifférent et Quand tu es là permet à Sylvie Vartan d’obtenir sa première percée au Top 50. Entré en février 1991 alors qu’elle a démarré son spectacle au Palais des sports, le 45 tours restera classé trois semaines non consécutives et atteindra la 48e place. Suite au succès du disque, une nouvelle pochette voit le jour avec une photo tirée du clip et qui remplace celle, plus sobre, qui présentait une photo dédoublée de la chanteuse sur fond blanc.

Au Palais des sports, Quand tu es là ouvre la deuxième partie de ce nouveau show intitulé Je vous salue Paris. Malheureusement pour la chanteuse, la Guerre du Golfe vient d’éclater et dans ce contexte difficile les Parisiens n’ont pas le cœur au divertissement. C’est donc dans des salles parfois seulement à moitié pleine que jouera la star qui annulera finalement deux semaines de représentations. Mais il en faudrait plus pour ébranler une carrière de légende et deux ans plus tard Sylvie Vartan sera de retour au Top 50 avec une interprétation live magistrale et émouvante de Tes tendres années qu’elle adressera directement à Johnny Hallyday, son ex-époux. 

Le 28 novembre 1992, elle rejoint Étienne Daho sur scène lors de son Tour de Paris et d’ailleurs et interprète avec lui Quand tu es là. Ils reprendront à nouveau ensemble la chanson en 2010 pour l’émission Tout le monde l’appelle Sylvie, une version qui sera incluse à l’édition limitée de son album Soleil bleu.

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1. France Inter, 6 décembre 1990 ↩︎
2. Étienne Daho, portraits & entretiens, Benoît Cachin, Tournon Carabas, 2007 ↩︎