Arnold Turboust – Adélaïde

Originaire d’un village normand, Arnold Turboust naît entouré de musique. Son père, notamment, fait régulièrement acquisition de divers instruments de musique et Arnold s’initie au piano. Adolescent, il s’enthousiasme évidemment pour la new wave déferlante et troque son piano contre un synthé. Éric Morinière, l’un de ses amis de lycée, est parti s’installer à Rennes où il a rejoint le groupe Marquis de Sade, fer de lance de la scène rock rennaise, qui s’apprête à enregistrer son premier album. La formation a justement besoin d’un clavier et c’est en toute confiance qu’Éric fait appel à son ami Arnold qui se retrouve pour la première fois de sa vie en studio. Après un passage par Nantes où il forme le groupe Private Jokes, ce n’est que quelques mois plus tard qu’il se décide à poser ses valises à Rennes où il est de l’aventure Octobre, vestige du défunt Marquis de Sade splitté en deux. À peine arrivé, il fait la connaissance d’un apprenti chanteur avec qui le courant passe et les affinités sont évidentes, un certain Étienne Daho. Ce dernier ne tardera pas à sortir un premier album au succès confidentiel réalisé avec les musiciens de Marquis de Sade.

Turboust se met aussi à composer pour Daho, et joue des claviers sur son premier succès, Le Grand Sommeil en 1982. Après Week-end à Rome deux ans plus tard dont la face B Poppy Gene Tierney est signée Turboust, il est évident que le duo créatif qu’ils forment est dans sa phase ascendante. Sans le sou, les deux amis squattent l’appartement d’un ami à Vincennes où ils se mettent au travail sur de nouvelles chansons à la demande de la maison de disques. Arnold propose à Étienne une suite d’accords qui va donner naissance à deux morceaux distincts : Adélaïde pour l’un et Tombé pour la France pour l’autre. Arnold qui ne pense pas vraiment à chanter, mais ne voit pas à qui proposer le morceau qu’il vient de composer et dont il a commandé un texte à son ami Benjamin Minimum, pose sa voix sur la démo.

Déclaration d’amour au parfum élégant et suranné du XVIIIe siècle, Adélaïde a du répondant et il faut trouver une voix féminine pour donner la réplique à l’énamouré. À l’époque Daho et Turboust côtoient Lio, Jacky mais également Zabou, qui a déjà poussé la chansonnette avec Dorothée ou pour les besoins d’un film. Amie d’Arnold, il lui a déjà proposé d’écrire des chansons ensemble, mais quant à lui proposer une participation vocale sur sa chanson il se peut que ce soit une idée d’Étienne Daho…

Profitant de quelques jours entre Noël et le premier de l’an au studio Synsound à Bruxelles où Daho est en train d’enregistrer, Arnold met rapidement sur bandes sa chanson dont il n’est pas vraiment satisfait mais que Philips, son nouveau label (déniché grâce au flair de son éditeur qui a craqué sur Adélaïde), s’empresse de faire mixer à Paris par Dominique Blanc-Francard. Le musicien avait en effet une préférence pour sa démo sur laquelle il avait essayé de marier une composition emprunte de classique à une rythmique moderne. Mais le jeune homme n’a pas la main sur tout et la production lui échappe.

Si à l’été 1985 Étienne Daho a cartonné avec Tombé pour la France (13e au Top 50), lorsque sort Adélaïde au printemps 1986, il ne se passe rien pendant plusieurs mois. La faute à une similitude trop marquée par rapport à l’ami Daho ? Quoiqu’il en soit, le charme du duo masculin-féminin, peut-être également aidé par son joli clip costumé réalisé par Christophe Smith, finit par convaincre les radios avant de faire son entrée au Top 50 début août. Atteignant la 23e place, le disque restera classé 15 semaines, avoisinant les 100 000 ventes.

Avec en face B De ma fenêtre, à nouveau signé Minimum et Turboust, Adélaïde bénéficie de l’incontournable version longue (remixée par Jean-Philippe Bonichon, Rico Conning et Turboust lui-même) en maxi 45 tours qui cartonne en discothèques. Un succès inattendu qu’Arnold Turboust va goûter sans peine et qui restera son titre-signature. Parallèlement, il vit aussi le succès de son ami Daho dont l’album Pop Satori, pour lequel il a signé six morceaux et co-réalisé huit, est disque de platine.

Difficile de donner suite et le 45 tours suivant, Les Envahisseurs, au texte signé Jacques Duvall, ne connaît pas le même engouement. En 1988, Let’s Go a Goa, son premier album, ne comprend pas le tube Adélaïde (il faudra attendre une réédition de 2018 pour que soit ajoutée la chanson et son remix).

Depuis, Arnold Turboust a sorti cinq autres albums, dont le superbe Sur la photo en 2023. Le 13 juin 2018 lors d’un concert au Café de la danse, il est rejoint sur scène par la comédienne Zabou Breitman qui vient à nouveau lui donner la réplique sur Adélaïde, morceau dont elle garde un excellent souvenir. En 2023, Adélaïde est remixée par Plaisir de France et la version originale fait son apparition sur les plateformes en 2024.

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