
Née en Tunisie, Amina est baignée toute jeune dans la culture musicale (sa mère et sa grand-mère sont musiciennes). Elle s’installe à Paris au milieu des années 1970 et met en pratique ses influences africaines au sein d’un groupe qu’elle monte dans son lycée et pour lequel elle se réapproprie des standards jazz ou reggae. Au début des années 1980, elle fait la connaissance à Radio Nova du producteur Martin Meissonnier (spécialisé dans le jazz, la musique africaine et organisateur du premier festival de raï) qui va devenir son mari.
En 1986 Amina donne de la voix dans les chœurs du tube C’est la ouate de Caroline Loeb. Inspirée par le mouvement rap qui prend de l’ampleur, elle publie quelques mois plus tôt son premier 45t, Sheherazade, mix de funk et de pop. De collaborations en collaborations, Amina fait parler d’elle, chante à l’étranger et prépare son premier album après la sortie en 1989 du single Belly Dance. Le morceau électronique, accompagné de nombreux remixes, sort un peu partout en Europe mais aussi aux États-Unis, au Canada et en Australie. Produit par Martin Meissonnier et réalisé par Maurice Poto Doudongo et Wasis Diop (musicien sénégalais, ami de longue date de la chanteuse), Yalil, le premier album d’Amina est un mélange d’influences, de la musique traditionnelle acoustique mêlée à des synthétiseurs et des boîtes à rythme. Le disque connaît une distribution internationale, tout d’abord en novembre 1989 au Japon dans une version 10 titres, puis en France et aux États-Unis en novembre 1990.
En 1991, la carrière d’Amina prend un nouveau tournant quand on lui demande de représenter la France au 36e Concours Eurovision de la chanson. Marie-France Brière, responsable des divertissements sur Antenne 2, après avoir sélectionné Joëlle Ursull avec White and Black Blues écrit par Gainsbourg l’année précédente, fait à nouveau le choix de la world music en faisant appel à Amina. Un moyen, sans doute, de présenter la France comme un pays ouvert et multiculturel (la chanteuse recevra par ailleurs son lot de lettres d’insultes…)
Amina s’adjoint à nouveau les services de son complice Wasis Diop pour composer une nouvelle chanson. Inspirée des événements de la guerre du Golfe, elle signe le texte de Le dernier qui a parlé. Une chanson politique donc, présentée par une femme franco-tunisienne dont les vocalises impressionnent sur une composition pleine de grâce : la France compte frapper un grand coup au concours ! Les médias français s’enflamment, faisant fi pour une fois du côté ringard présumé de la manifestation, et couvrent l’événement, présumant une possible victoire.
Le jour J, 4 mai 1991, dans les studios de la Cinecittà à Rome où a lieu l’événement, Amina fait sensation habillée en Jean-Paul Gaultier et offre une prestation remarquable de sa chanson. Le public français est en émoi et tous les espoirs sont alors permis. À la fin des votes, la France se retrouve en tête, ex-æquo avec la Suède représentée par Carola et une chanson au style diamétralement opposé à celle de la France. Le règlement de l’Eurovision n’accepte plus de victoires multiples depuis que quatre pays sont arrivés en tête en 1969, il faut donc départager la France et la Suède. On prend en compte le nombre de 12 points reçus par chacun des deux pays mais on arrive encore à une égalité. On examine alors le nombre de 10 points et c’est malheureusement la France qui en fait les frais, cédant le trophée à la Suède. La deuxième place est difficile à digérer pour les Français qui s’en étaient déjà contentés un an auparavant avec Joëlle Ursull.
Le dernier qui a parlé… sort en 45 tours, en maxi 45 tours et en CD single en Europe accompagné d’un remix signé des Britanniques de DNA. Étonnamment le succès est discret en France où le morceau se contente d’une 30e place dans les classements. Il sera mieux accueilli en Europe, notamment en Suède où il est 19e ou en Autriche où il est 22e. L’album Yalil ressort en avril dans une nouvelle édition incluant Le dernier qui a parlé… et fait sensation aux États-Unis où il se classe 5e du Billboard World Music.
Amina reçoit le Prix Piaf de la meilleure chanteuse, ainsi qu’une nomination aux Victoires de la musique 1992, et poursuit ensuite sa carrière, sort des albums jusqu’en 1999 et se lance tôt dans le cinéma où elle sera dirigée par Claude Lelouch ou encore Bernardo Bertolucci. En octobre 2021, elle publie enfin un nouvel album, La Lumière de mes choix, principalement composé par Léonard Lasry avec des textes d’Élisa Point.
(la chanteuse recevra par ailleurs son lot de lettres d’insultes…)
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Putain je suis pas étonnée mais c’est tellement triste…
En tout cas, j’aime beaucoup cette chanson et quel dommage d’être arrivée en 2nd place !
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