Parmi les très nombreuses productions qui ont envahi les disquaires dans les années 80, elles ont eu la chance elles aussi de sortir un disque ! Passant parfois très près du tube, elles sont toutefois restées confinées à un succès d’estime, même si certaines d’entre elles ont pu traverser la décennie (à l’époque, les maisons de disques étaient souvent moins frileuses à penser une carrière sur le long terme).
Certains de leurs refrains sont peut-être encore enfouis au fond de votre mémoire aujourd’hui, et nous, on garde beaucoup de tendresse pour ces chanteuses qu’on ne se lasse pas de redécouvrir et dont vous retrouverez régulièrement les portraits dans cette rubrique.

Chanaël

Née d’une mère haïtienne et d’un père canadien, Chanaël (de son vrai nom Gilberte Celestin) voit le jour en Haïti mais passe son enfance au Canada. « J’ai toujours chanté », se souvient-elle. En effet, la jeune femme a un rêve : devenir chanteuse. Mais sa famille ne la soutient pas du tout dans cette voie et ne prend pas ses envies au sérieux. Elle en fera fi et, pleine d’ambition, s’envolera pour Paris en 1985, ville de tous les espoirs. Là, on la remarque d’abord pour son physique avantageux et elle pose pour quelques photos de mode même si ce n’est vraiment pas sa vocation. En parallèle, elle se forme au chant et à la comédie.

À la rentrée 1985, une nouvelle émission fait son apparition sur TF1, Les Habits du dimanche, présentée par Léon Zitrone. Il s’agit d’un télé-crochet hebdomadaire où des jeunes talents s’affrontent dans les catégories chant, comédie, danse et mannequinat. Si l’on y découvrira Patrick Fiori (qui ira jusqu’en finale), c’est aussi l’occasion pour Chanaël de faire ses débuts à la télévision française. Le 2 mars 1986 elle se présente dans la catégorie chant et remporte le titre durant quatre semaines consécutives. Elle revient en juin pour la demi-finale mais perd face à Patricia Atlan qui remporte la compétition (elle sortira deux 45 tours, sans succès).

Tout n’est pas perdu pour Chanaël puisque devant son petit écran, Orlando a été séduit par son charme et son naturel. L’ex-chanteur qui produit essentiellement sa sœur Dalida mais aussi Guy Criaki et Lionel Kazan, ne tarde pas à faire de Chanaël sa nouvelle petite protégée. Il met à son service son équipe d’auteurs-compositeurs et, ainsi, Michel Jouveaux et Michel Daladouire signent la face A du premier 45 tours de Chanaël, Avis de recherche, quand Frédéric Chateau et Jean-Christophe Ducatel sont recrutés pour la face B, Si ce n’était pas un rêve.

« Avis de recherche, Dans tous les journaux, Je mets ta photo, Et mon numéro », Chanaël cherche son amoureux désespérément ! La chanson est entraînante et la chanteuse charmante, et elles bénéficient tout de suite d’une promotion conséquente. Chanaël fait ses débuts le 3 mai 1987 chez Jacques Martin puis on la voit dans un Champs-Élysées spécial Antilles. Les retours sont encourageants mais pour vraiment faire décoller le titre, Orlando va le faire remixer par Dimitri et Jean-Philippe Bonichon qui livrent une version à la rythmique bien plus marquée. Elle remplace le premier mixage en octobre 1987 et un nouveau 45 tours est pressé avec le remix et une nouvelle photo. Avis de recherche est 37e du hit NRJ et Chanaël en assure la promotion jusqu’en fin d’année sans qu’il arrive toutefois à entrer au Top 50.

L’année suivante, Chanaël enregistre Manolito, dans la même veine, mais la chanson qu’on doit aux auteurs-compositeurs de Détournement de majeur de Lionel Kazan, est loin de susciter le même engouement, et la promotion se réduit à peau de chagrin. Voyant son début de carrière lui échapper, Chanaël reprend les choses en main. Elle déclare au magazine Top 50 qu’elle n’était pas vraiment satisfaite de ses deux premiers 45 tours : « Ce n’était pas ma musique. Pas celle que j’avais envie d’écouter du moins. C’était bien foutu mais trop facile ».

Elle revient en mai 1989 avec un nouveau titre, une ballade cette fois, dont elle signe elle-même les paroles sur une musique de Nicolas Skorsky. Dans Comme quand l’amour, son amoureux s’est encore fait la malle, Chanaël joue décidément de malchance. La chanson, qui lui permet de mettre en avant ses capacités vocales, est plus en accord avec ses aspirations. « Ce nouveau titre est plus ferme. Nous avons parlé avec Orlando, mon producteur, de changements musicaux à faire, car je pars du principe qu’un artiste doit être heureux de ce qu’il fait… Jusqu’à aujourd’hui, je trouvais que ça n’avançait pas, Orlando m’a écoutée, comprise et voilà ! »

En face B, Didier Barbelivien livre La Louisiane, arrangé et réalisé par Bernard Estardy, un titre qui n’aurait pas dénoté sur le premier album de Patricia Kaas. Le nouveau disque retient l’attention : un clip est tourné et obtient de bonnes rotations, on voit Chanaël à Sacrée soirée, et la chanson est à nouveau classée sur NRJ. Mais Comme quand l’amour reste encore une fois aux portes du Top 50, signant l’arrêt de la carrière discographique de la chanteuse.

Elle donnera des nouvelles en 2018. De retour à Montréal, elle n’a jamais abandonné son rêve. « À un moment donné ma carrière a eu sa crise, qui perdure. Et maintenant, ce que je suis devenue, ben je chante sur la rue, dans le quartier chinois. Cet hiver, ce sera peut-être dans le métro… Je rêve d’une petite scène, acoustique, un petit tambour, une guitare, tout simplement. J’ai très envie de prendre ma revanche. »

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