Chanteuse de musique traditionnelle écossaise, Mary Sandeman va passer de l’anonymat à la célébrité fulgurante grâce à la magie d’un unique tube : Japanese Boy.
Relativement connue localement dans le milieu de la musique folk, Mary Sandeman se voit proposer, au début des années 80, une chanson qui n’a pas grand-chose à voir avec son répertoire habituel. Bob Heatlie, lui-même écossais, a écrit Japanese Boy, une pop song au rythme disco jouant sur les sonorités asiatiques. Un peu indécise, la chanteuse de 27 ans décide toutefois de relever le défi et d’enregistrer le morceau avec une voix haut perchée, très différente de la manière dont elle a l’habitude d’interpréter ses airs écossais. Mais pour promouvoir le single il faut changer le nom de l’artiste et lui trouver un pseudonyme plus efficace et en accord avec la chanson. Peu inspirée, l’équipe artistique en charge du projet feuillette l’annuaire d’Edimbourg et, sans chercher très loin, s’arrête sur le nom Aneka… Un pseudo aux consonances asiatiques parfaites que la chanteuse accepte même si elle avoue aujourd’hui avoir eu la désagréable sensation d’être assimilée à un produit un peu trop bien marketé. Non content de changer son nom, on s’occupe également de relooker Aneka, qui se voit affublée d’une perruque et d’un kimono.
Dans les années 80 l’Asie fascine le monde de la pop et l’on s’en inspire allègrement, quitte à mélanger les genres et les cultures dont, de toute façon, on ne connait pas les différences. Alphaville chantera Big in Japan, David Bowie China Girl, Rose Laurens Mamy Yoko, Nancy Nova Made in Japan et Murray Head One Night in Bangkok. Mais en 1981 Aneka lance la tendance et Japanese Boy, chanson dans laquelle elle se désole de la disparition de son petit copain japonais, devient rapidement un tube. La chanteuse, qui continue en parallèle sa carrière dans la folk, se souvient que le jour où Japanese Boy atteint la première place des charts britanniques elle donne un concert au Festival d’Edimbourg en tant que Mary Sandeman. Le 45t est également n°1 en Irlande, en Suède, en Suisse, en Belgique, n°3 en Allemagne, n°4 en Autriche et en Norvège alors qu’en France le disque est certifié platine pour plus de 500 000 ventes. Mais Japanese Boy ne résonnera pas jusqu’au Japon où l’on trouve que le titre sonne trop chinois (le morceau sera d’ailleurs repris en 1983 par une chanteuse japonaise sous le titre Chinese Boy) ! Edité en maxi 45t, Japanese Boy est remixé pour les clubs par Rusty Garner (« An Endless Music Mix », uniquement en Amérique du Nord).
La même année en France, le succès de la chanson est tel qu’on s’en inspire en l’adaptant dans la langue de Molière. C’est la jeune chanteuse Marion qui s’y colle sur des paroles qui se passent de commentaires (« Un jour nous retourner à la maison de thé, quand reviendra l’été, moi vous faire l’amour dans la maison de papier, quand le temps a passé »…). Rebaptisé Sayonara Monsieur Kung-Fu, le moins que l’on puisse dire est que le titre ne marquera pas les annales.
Suite au succès éclair de Japanese Boy, Aneka est vite confrontée à la difficulté de donner suite à un tube fulgurant. En gardant la rythmique de Japanese Boy, on tente d’appliquer la même formule à Little Lady, le 45t suivant qui sort à l’automne avec succès en Autriche (n°7) et en Allemagne (n°10) mais pas au Royaume-Uni où il se contente de la 50e position. On décide alors de conserver la tonalité aigüe qui a fait le succès de la jeune femme mais on lui rend par contre une apparence plus occidentale pour Ooh Shooby Doo Doo Lang en 1982, son dernier 45t à occuper les charts en Allemagne et en Autriche. Véritable one-hit wonder, Aneka publie un unique album en 1981 qui se contente d’une 19e place en Suède.
Une poignée de 45t plus tard, Aneka redevient Mary Sandeman et reprend sa carrière de chanteuse folk. Un soulagement pour cette femme de médecin et mère de deux enfants, peu à l’aise dans l’univers du show-business.
En 2002, Japanese Boy est utilisée dans la BO du jeu vidéo Grand Theft Auto: Vice City, dont l’action se déroule dans les années 80, au même titre que les tubes de Michael Jackson, Laura Branigan, Talk Talk ou Lionel Richie.
Interviewée en 2004 lors de l’émission Bring Back The One Hit Wonders, Mary revient sur son succès pop mais refuse de revenir le chanter en télé.
Aujourd’hui divorcée, Mary Sandeman a tiré un trait sur sa carrière de chanteuse et est devenue guide touristique en Écosse.