Chanteurs des 80’s : Serge Guirao / Christophe Jenac

Parmi les très nombreuses productions qui ont envahi les disquaires dans les années 80, ils ont eu la chance eux aussi de sortir un disque ! Passant parfois très près du tube, ils sont toutefois restés confinés à un succès d’estime, même si certains d’entre eux ont pu traverser la décennie. Après Lionel Kazan et Philippe Entre2mers, retrouvez les portraits de Serge Guirao et Christophe Jenac, deux chanteurs qui ont notamment comme point commun d’avoir travaillé avec Julie Pietri.

Serge Guirao

Serge Guirao Pop Music Deluxe

Né au Maroc en 1953 d’un père catalan, Serge Guirao va grandir à Toulouse où il étudie le solfège et la contrebasse pendant plusieurs années au conservatoire. Très rapidement, le jeune homme a envie de composer, de chanter et de se produire sur scène. Comme de nombreux autres musiciens de la région, il se trouve quelques contrats dans des orchestres du coin et fait notamment un passage chez Goldfingers (futur Gold dans les années 80) où on l’entend au chant dès 1972. Il troque ensuite sa contrebasse contre une basse électrique et accompagne d’autres musiciens dès 1978. Il part en Espagne avec Miguel Bosé tout d’abord, met en musique des poèmes de Gloria Fuertes, puis il fait le tour de l’Argentine avec Alberto Cortez qui va lui produire son premier album. Intitulé ¿Quien sera? sous le nom de Sergio Guirao, ce premier 33 tours publié en 1981 en Amérique du sud et enregistré entièrement en espagnol avec des morceaux de sa composition est aujourd’hui introuvable.

De retour à Toulouse, il signe un contrat chez RCA et enregistre un premier 45 tours, Fréquence passion, un morceau destiné à une chanteuse mais que son producteur le convainc d’enregistrer lui-même en gardant la tonalité de voix. Dans les bacs en 1983, le slow est enregistré au fameux studio Condorcet, créé à Toulouse par François Porterie et Jacques Cardona qui réalisent le disque ainsi que les premiers de Gold à la même époque. Fréquence passion assure de bonnes diffusions à Guirao sur les ondes locales, tout comme le 45 tours suivant, Signé Señorita (Envie De Toi) en 1984, un clin d’oeil à ses années passées dans les pays hispanophones. A la même époque, il assure la première partie de la tournée d’été de Dalida dans le sud de la France mais son succès trop confidentiel est sans doute insuffisant pour la maison de disques.

Désormais produit par Maurice Téjédor, qui s’occupe également des tournées de Francis Cabrel, Guirao signe chez CBS qui va lui assurer une promotion plus conséquente et notamment des passages télé nationaux. Fascinación (De Amor), le single de 1985, est réalisé par François Bréant, collaborateur de Lavilliers, Bashung, mais également de Jean-Pierre Mader, ami toulousain de Guirao qui commence à cartonner avec son italo-disco. Ce son de discothèques, Serge Guirao va se l’approprier lui aussi en un mélange de variété teintée d’exotisme et d’une touche de charme latin à la Julio Iglesias. S’il enregistre désormais ses morceaux en français puis en espagnol dans des adaptations de son ami compositeur J.R. Flórez, il n’en oublie pas les versions longues qui sont désormais indispensables pour passer en clubs. Fascinación se fait remarquer et Guirao est l’un des espoirs du MIDEM en février 1986 dont le concert est retransmis lors de l’émission La Nouvelle Affiche parrainée par Michel Berger et Jean-Jacques Goldman et où il se retrouve entouré de Jeanne Mas, Marc Lavoine et Jesse Garon.

Le chanteur poursuit sa route au rythme régulier d’un single par an et en 1986 c’est Maria (toujours enregistré à Toulouse alors qu’il est désormais installé à Paris) qui enfonce le clou tandis que Devine en 1987 est un frissonnant du Top 50 qui va se classer au hit RTL. La même année paraît son premier album, En chanteur, qui reprend les précédents singles CBS à l’exception de Maria. Il est pour l’occasion invité par Julie Pietri à se produire en première partie de son Olympia en décembre, tout comme le sont les débutants Eric Morena et Patricia Kaas. Guirao ayant visiblement conservé de bons rapports avec Julie Pietri, on le retrouvera à la composition des titres Salammbô et Priez pour elle sur l’album La Légende des Madones en 1989.

En 1988, c’est avec Combat de cobras (extrait de l’album) qu’il frôle le hit. Ce duel amoureux langoureux à métaphore animalière bénéficie d’un clip et de deux remixes et est à nouveau un espoir du Top 50, sans toutefois y entrer. Entre le ciel et la terre est le dernier extrait du 33 tours en 1989 et ne fait pas mieux. Laurent Stopnicki, qui lui écrit désormais des textes, commente cette collaboration sur son site : « J’ai écrit une bonne partie des textes de Serge Guirao, un artiste compositeur interprète prometteur, dont les maquettes étaient sublimes et les productions finales décevantes. Serge avait un niveau d’exigence sur la sonorité des textes qui m’ont obligé à me surpasser. » La vague toulousaine qui déferle sur le Top 50 dès le milieu des années 80 (de Mader à Gold en passant par Jean-Jacques Lafon, Pacifique, Art Mengo, Images ou Pauline Ester) aura laissé Guirao sur le carreau.

Il poursuit tout de même avec un troisième album chez WEA en 1991, toujours réalisé par Jacques Cardona, avant de mettre un terme à sa carrière de chanteur de variétés. Il revient à ses premières amours et créé un spectacle en espagnol au festival Alors chante à Montauban, publie l’album La Nuit obscure avec Vicente Pradal et Ruben Velasquez en 1996, interprète Pelleas dans Pelleas y Melisanda, sur des poèmes de Pablo Neruda, à la Scène Nationale de Quimper puis à Toulouse, Montpellier et Angers en 2001/2002, collabore avec Nilda Fernandez… En 2005, on lui diagnostique une sclérose en plaques. Ses amis artistes organisent depuis régulièrement des concerts afin de lui apporter leur soutien. Ses chansons sont désormais introuvables en CD ou sur plateformes.


Christophe Jenac

Christophe Jenac Pop Music Deluxe

Petit fils de Guy Lux, Jean-Christophe Lauduique se lance dans la chanson en 1985 sous le nom de Christophe Jenac. L’année précédente, il avait signé le titre Musique ma folie pour Ritchy en compagnie de Vincent-Marie Bouvot. C’est ce dernier qui va lui composer son premier 45 tours à tendance new wave (qui n’est pas sans rappeler Alphaville), Bleu de chine, sur un texte de Didier Golemanas, qui sort chez Carrere. Si l’effort n’est pas encore concluant, la jeune équipe se lance la même année à l’assaut d’un genre qui prend de plus en plus de place en discothèques et au Top 50 : l’italo-disco. Nous n’avons pas choisi ce monde, déclaration d’amour sur fond de complainte apocalyptique et désenchantée (« Dans les cités de verre ton cœur ne trouve plus le sommeil, Tout en bas dans les rues des enfants pieds nus jouent à la guerre ») est écrit et réalisé par Patrick Coutin et Vincent-Marie Bouvot, et le mixage en est confié à l’incontournable Dominique Blanc-Francard. Mais la première version du morceau peine à décoller et une version longue remix encore plus efficace est réalisée en 1986 par Bouvot et Jenac à destination des discothèques. Le 45 tours est repressé avec une version courte du même remix mais à nouveau le hit en puissance échappe au Top 50. Ressuscité en 2006 sur la compilation Club 80, Nous n’avons pas choisi ce monde reste aujourd’hui un morceau de choix pour les aficionados d’italo-disco. La face B du 45 tours, Oublie tout ça, est un morceau dont Christophe Jenac co-signe le texte et qui sera repris par Julie Pietri en face B de son 45 tours Nuit sans issue sous le titre de Voyage en moi.

Changement de style à nouveau à l’été 1987 avec Ça fait mal, dont il co-signe le texte avec Coutin, toujours sur une musique de Bouvot, une composition qui lorgne vers le rock rétro, sorte de Thierry Hazard avant l’heure. C’est sans doute son titre qui fonctionnera le mieux, labellisé « espoir du Top 50 » mais sans transformer l’essai. A la même époque il écrit sur l’album Le Premier Jour de Julie Pietri, produit par Vincent-Marie Bouvot.

En 1988, Jenac passe chez Agone (label qui signe aussi Eric Morena ou encore Les Blatt’s et Les Forbanks pour lesquels il écrira) où il sort le slow Swimming Pool habillé en Paco Rabanne. Mais un changement de pochette n’aidera pas à relancer les ventes et l’album Talisman annoncé ne paraîtra pas.

Nouvel essai en 1989 chez Vogue avec Trois filles dans mes bras qu’il signe seul, plutôt rock cette fois avec une intro à l’accordéon (on pense à Soldat Louis qui vient de cartonner). Christophe Jenac aura passé la décennie à se chercher sans toutefois trouver un véritable écho chez le grand public. Son premier album, c’est sur le label Pense à moi d’AB Productions qu’il le publie en 1994. Intitulé Sur les traces de Dorian Gray, arrangé par Erick Benzi et porté par les singles Où êtes-vous ? et Dandy dans la rivière, le projet ambitieux dans une veine plus acoustique passe inaperçu. A la même période, Christophe devient père et baptise son fils Dorian. Aujourd’hui musicien lui aussi, Dorian est l’une des moitiés du duo Ofenbach (n°7 au Top en 2016 avec le single house Be Mine, également un carton dans toute l’Europe).

Plus tard vocaliste et auteur pour un groupe de rock, Christophe se met ensuite à la house dans les années 2000 et signe également des habillages pour des émissions comme Intervilles. Aujourd’hui maître coutelier dans le Pays basque, il publie des ouvrages de référence comme Couteaux pliants de nos provinces ou l’Almanach du couteau.

Christophe Jenac – Nous n’avons pas choisi ce monde

2 commentaires

  1. Encore un bel article sur Serge GUIRAO qui n’aura malheureusement jamais classé un de ces titres au TOP 50, la référence à l’époque.Du coup, sa carrière n’a jamais pu atteindre le sommet et c’est vraiment dommage.Ses titres sont de véritables hits, les versions maxi sorties à l’époque étaient vraiment bien.Il aurait mérité un succès.Dommage que sa maison de disques n’a jamais voulu sortir une compilation de ses hits en version 45 T, maxis et ses adaptations en espagnol.

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  2. Ah mon chouchou Christophe Jenac. J’ai découvert Nous n’avons pas choisi ce monde grâce à cette compile dont vous parlez et j’ai adoré ! J’ai ensuite acheté tous ses 45 tours et son album.

    Alors je dois dire que autant j’adore son p’tit succès d’estime remixé ou non d’ailleurs, ainsi que Bleu de chine et Swimming Pool, autant je n’aime pas du tout Trois filles dans mes bras.
    Je suis mitigé pour « ça fait mal ».

    J’aurais vraiment aimé qu’il sorte son album Talisman en 1988…

    En tout cas celui sorti chez AB est très réussi. Il aurait vraiment mérité plus de succès.

    Merci pour votre article !

    Aimé par 1 personne

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