Caroline Loeb – À quoi tu penses ?

Y a-t-il un domaine artistique dans lequel Caroline Loeb n’ait pas quelques compétences ? Un rapide coup d’œil à son CV permet légitimement de se poser la question. Fille de galeriste, elle passe son enfance à New York avant de s’installer à Paris où elle suit les fameux cours Florent. Dans les années 70 et 80, elle décroche quelques séquences et figurations dans des films de Jacques Demy, Jean Eustache ou James Ivory, pour ne citer que les plus prestigieux. Elle apprend en même temps le stylisme photo avec Jean-Baptiste Mondino avec qui elle travaille sur les pochettes des albums de Christophe, Alain Chamfort ou Michel Jonasz. Un professeur de choix qui signera le visuel de son premier album, Piranana, qui sort en 1983. Un disque qui voit le jour sous l’impulsion de Michael Zilkha qui a lancé le label ZE Records cinq ans auparavant à New York. Séduit par les textes de la jeune artiste, il lui fait enregistrer ce premier disque à la va-vite dans le studio créé par Jimmy Hendrix en personne ! Réalisé par Ron Rogers (qui travaille à l’époque avec Kid Creole And The Coconuts), ce premier essai electro-new wave passera inaperçu malgré l’avis enthousiaste de quelques critiques.

C’est fin 1986 que Caroline Loeb explose aux yeux du grand public avec le titre C’est la ouate. Co-écrit avec Pierre Grillet (à qui l’on doit des titres pour Sylvie Vartan, Patrick Juvet ou le tube À cause des garçons) sur une musique de Philippe Chany (compositeur de musiques de films et d’émissions pour Les Nuls), C’est la ouate va s’imposer comme l’un des titres emblématiques des 80’s. Le 45t atteint la 5e place du Top en France début février 1987, se vend à près de 300 000 exemplaires et obtient un disque d’argent. Mais, chose plus rare pour une chanson française, C’est la ouate se retrouve en tête des ventes en Italie et en Espagne, décroche une 10e place en Allemagne et une 30e en Autriche.

Dans la foulée, un deuxième 45t est lancé, À quoi tu penses ?, dont Caroline signe cette fois le texte à elle seule, toujours sur une musique de Philippe Chany. Un texte doux-amer et désabusé sur une composition minimaliste marquée par la boîte à rythmes, et soulignée par les chœurs d’Yvonne Jones et Debbie Davis, font d’À quoi tu penses ? un morceau dans la lignée directe du single précédent. Peut-être même un peu trop proche pour en réitérer le succès fulgurant. La chanteuse nous disait pourtant en 2019 n’avoir eu aucune volonté d’en répliquer la recette. « Je n’ai jamais voulu reprendre la formule C’est la ouate, d’ailleurs la formule elle s’est auto-détruite avec C’est la ouate. Il n’y avait pas de formule, ça a été une succession de petits miracles : une phrase de Pierre Grillet, moi qui écris d’autres choses, la musique de Chany, le gimmick… Ce n’est pas quelque chose qu’on peut réessayer de fabriquer. À quoi tu penses ? c’est un texte que j’ai écrit, que Chany a mis en musique. Pour moi les chansons s’écrivent très naturellement, je trouve toujours ça assez facile d’écrire des chansons, parce que j’adore ça en fait. Je suis vraiment nourrie de chansons, de Gainsbourg, de Françoise Hardy. C’est une forme qui s’écrit presque toute seule. La musique de la phrase induit les mots. »

Un clip sous forme de séance photo est réalisé et met en évidence les charmes de la chanteuse, tout comme la photo de la pochette signée Bettina Rheims. Elle en démarre la promotion au mois de juin 1987, conjointement à celle du film Cœurs croisés de Stéphanie de Mareuil dont elle est la vedette. Mais l’ascension fulgurante de la jeune artiste est stoppée net dès ce nouvel essai qui n’intègre pas le Top 50. En Italie, la chanson se classe pourtant 14e des diffusions en juillet sur la Rai Stereo Due et pointe dans le top 30 des meilleures ventes. En Allemagne, elle se glissera timidement à la 67e place des charts. À l’occasion, différents pressages du 45t sont édités (avec une version courte de la chanson) et notamment un maxi italien incluant une version remixée (très similaire à la version album) et l’instrumental du titre.

Un deuxième album, Loeb C.D., sort la même année, suivi des singles Amants z’aimants, Mots croisés et Le Téléfon (reprise de Nino Ferrer), sans succès. Caroline Loeb a du mal à se remettre d’un succès fulgurant et éphémère et les années suivantes sont difficiles. Elle en fera d’ailleurs état dans Has Been, une autobiographie déguisée parue en 2006 chez Flammarion. Mais la force de la Loeb c’est d’avoir plus d’une corde à son arc. En 1995 sort le single J’te hais dans la peau, préfigurant un album qui ne verra jamais le jour. Tant pis, Caroline devient animatrice télé et radio et se découvre une passion pour la mise en scène. Elle débute avec Michel Hermon au Théâtre des Bouffes du Nord, puis à la Colline. Elle met en scène Judith Magre, ses collègues Lio et Viktor Lazlo dans des spectacles musicaux, elle se réapproprie Les Monologues du vagin et réalise un court-métrage.

En 2009 elle sort l’album Crime Parfait, bande-son de son nouveau spectacle Mistinguett, Madonna et Moi, un cabaret décalé, hommage à ses idoles féminines, qu’elle crée à Avignon et tourne pendant cinq ans en France et à l’étranger. Le succès public et critique est au rendez-vous. Elle continuera avec George Sand et moi !, Françoise par Sagan, puis Chiche !, un spectacle musical qui est l’occasion d’un nouvel album en 2019, sur les traces de Françoise Sagan (voir notre interview).

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