Chanteuse des 80’s : Marie

Parmi les très nombreuses productions qui ont envahi les disquaires dans les années 80, elles ont eu la chance elles aussi de sortir un disque ! Passant parfois très près du tube, elles sont toutefois restées confinées à un succès d’estime, même si certaines d’entre elles ont pu traverser la décennie (à l’époque, les maisons de disques étaient souvent moins frileuses à penser une carrière sur le long terme).
Certains de leurs refrains sont peut-être encore enfouis au fond de votre mémoire aujourd’hui, et nous, on garde beaucoup de tendresse pour ces chanteuses qu’on ne se lasse pas de redécouvrir et dont vous retrouverez régulièrement les portraits dans cette rubrique.

Marie

« J’ai toujours eu ce désir en moi. Celui de faire du théâtre et du cinéma », raconte Marie Chevalier en 1987, alors qu’on la découvre sur nos petits écrans avec une chanson peu banale, Everybody says yeah ! (L’homme qui dit no). La jeune femme née à Belfort avait bien tenté de suivre des études de pharmacie pour rassurer son père, mais rien à faire, ce sont les carrières artistiques qui l’attirent. Elle quitte l’Alsace qui l’a vue grandir et s’installe à Paris où elle s’inscrit aux cours Florent, dans la classe de Francis Huster où elle a pour camarade Pierre Cosso et Philippine Leroy-Beaulieu. « J’étais persuadée qu’après cette formation, j’allais trouver plusieurs contrats. Hélas ! Je me suis présentée à des tas de castings mais sans résultats concluants. D’autres auraient pu se décourager, mais pas moi. De toute façon, c’était simple : je ne savais pas faire autre chose ! J’ai bien essayé d’être vendeuse, j’ai tenu huit jours et six jours comme hôtesse dans un restaurant… » On l’apercevra pourtant dans un épisode de la série Les Amours romantiques en 1983 puis dans le film L’amour propre ne le reste jamais très longtemps en 1985.

Puis sa route croise celle de Manu Vogel, qui a déjà sorti un 45 tours et qui a produit Lesley Jayne et Cassie, les compagnes des Martin Circus, au début des années 80. Il propose à Marie d’enregistrer, ce à quoi elle n’avait jamais pensé. « Mais c’est vrai qu’adolescente, je chantais souvent devant ma glace ou devant mes copains ». Vogel lui propose trois chansons et Marie opte pour L’homme qui dit no, un morceau écrit par Elisabeth Wiener et Jacques Lennoz qui se cacheront sur la pochette du disque, avec humour, sous les pseudos J. Anver et E. Contretou. Wiener et Lennoz ont fait partie du groupe Phoenix à la fin des années 1970 avant d’écrire et de composer ensemble les albums d’Elisabeth.

Véritable OVNI musical, Everybody says yeah ! (L’homme qui dit no) ne manque pas de second degré et s’amuse notamment avec les samples, les registres et les voix, si bien qu’on a parfois du mal à y retrouver notre apprentie chanteuse. Et pourquoi donc cet accent faussement américain ? Et qui est donc cet homme qui dit no, qui joue avec la planète et qui fait froid dans le dos ? Il s’agit d’un pastiche de nos leaders commentera Marie, un texte politique donc…

« Si j’étais absolument terrorisée par le trac devant mon micro, j’ai tout de même adoré cette expérience au point de vouloir récidiver bientôt », dit-elle à la sortie du 45 tours en avril 1987. Avec une version anglaise en face B, Marie vient présenter son disque en télé dès le 27 avril dans une mise en scène à la hauteur de la folie de sa chanson. Mais c’est à la rentrée que le disque prend son essor et l’on voit Marie dans La Classe, chez Childéric, au Jacky Show et même à Sacrée soirée. Entre-temps la pochette du disque a changé et le titre est devenu simplement L’homme qui dit no.

Fin octobre, le 45 tours entre à la 65e place du Top 50 (le classement des « frissonnants » comme on l’appelait, de la place 51 à 70, fut publié sur une courte période dans l’hebdomadaire Top 50) mais ne franchira pas la 50e place si convoitée. Un an plus tard, Claudia Phillips se classera 14e avec un titre tout aussi déjanté, Quel souci La Boétie !

Après ce succès d’estime, il aurait été dommage de ne pas insister et un deuxième 45 tours est mis en chantier pour 1988. Marie passe de chez Ariola à Carrère et propose, dans un autre registre, une adaptation du mythique Put the Blame on Mame interprété par Rita Hayworth dans Gilda en 1946, lors de la fameuse séquence suggestive où l’héroïne se défait de ses gants lors d’une danse pleine de sous-entendus. La chanson a déjà été reprise de nombreuses fois bien entendu, et notamment en 1985 par Viktor Lazlo sur son premier album, mais il s’agit ici d’une adaptation en français dans un registre encore plus provoquant. Jugez plutôt : « Un jour de Noël, à 13 ans et demi, maman était partie, J’étais là sur ses genoux et j’ai eu chaud d’un coup, C’est pas les flammes de la cheminée qui m’avaient allumée, Si je suis comme ça moi, c’est la faute à papa », entonne Marie de manière évocatrice sur un texte de Jacques Lennoz. D’un goût d’apparence plus douteux qu’humoristique, cette petite histoire que n’aurait sans doute pas renié Sophie Favier a pourtant déjà été édulcorée afin d’échapper à une éventuelle censure. « C’est un peu sulfureux effectivement, admet la chanteuse. On avait une première version avec des paroles qui étaient un peu trop poussées alors on a dit la même chose mais d’une autre manière ». Le détournement du texte original, qui imputait aux femmes tous les maux de la Terre, pour affirmer ici que tout ça finalement « c’est la faute à papa », n’a peut-être pas été bien reçu… Marie envisage déjà le tournage d’un clip en 35 mm avec une image forte et une robe fourreau. Mais les oreilles chastes ne l’entendent pas ainsi et la promotion de C’est la faute à papa (disque qu’elle dédie à sa maman) va se réduire à peau de chagrin, stoppant net toute tentative d’exploitation commerciale et par la même occasion la carrière de chanteuse de Marie.

La jeune femme va heureusement rebondir et c’est à la télévision qu’on la retrouvera quelque temps après, à l’animation d’émissions sur M6 avant de devenir l’une des vedettes de la sitcom Les Filles d’à côté à partir de 1994. On la retrouvera par la suite régulièrement au casting de fictions télévisées françaises et au cinéma.

À lire dans notre série « Chanteuses des 80’s » :

3 commentaires

  1. Vue dans une émission jeunesse, j’avais acheté le 45 tours première version. Dommage qu’elle n’ai pas sorti un album.

    Pourriez-vous écrire un article sur Carole Serrat qui chantait « Suzy et moi »?

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